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Projections d'eau sur les véhicules : simulation en soufflerie

Tous les automobilistes ont connu cette situation. Par temps de pluie, il n’est jamais agréable de se trouver dans le sillage d’un autre véhicule et de recevoir ses projections d’eau. Outre les difficultés de conduite et l’inconfort éprouvé par les occupants de la voiture "suiveuse" à rouler dans de telles conditions, ces projections d’eau sous capot peuvent également affecter la sécurité et le fonctionnement des organes moteurs des voitures. "Depuis une dizaine d’années, le CSTB arrive parfaitement à reproduire en soufflerie les effets d’un événement pluvieux simple, pour des précipitations et des vitesses de roulage données, rappelle Jean-Paul Bouchet, ingénieur au CSTB. Mais aujourd’hui, les constructeurs souhaitent aller plus loin : que se passe-t-il quand on suit un autre véhicule ? Derrière cette interrogation, a priori toute simple, se cache en fait une équation aux multiples inconnues. Sa résolution dépend, entre autres, de la quantité d’eau stagnante sur la chaussée, de la nature de l’enrobé, du type de véhicule suivi, de sa vitesse, de son aérodynamisme, des pneus dont il est équipé, de la vitesse du véhicule "suiveur", de la force de vent latérale, etc.

Des conditions d’essais stabilisées

"En février 2008, nous avons mené une campagne d’essais en partenariat avec le groupe PSA sur les pistes de roulage de Sochaux Montbéliard, informe Jean-Paul Bouchet. Il s’agissait en tout premier lieu de mesurer la quantité d’eau reçue par la voiture suiveuse dans des conditions très pénalisantes et ce, à différentes hauteurs prédéterminées." Au cours de la phase préliminaire du travail, les équipes du CSTB ont mis au point les capteurs à installer sur le véhicule. Ils ont été conçus de manière à collecter l’eau projetée sans perturber l’écoulement de l’air. Un dispositif particulier "ouvert/fermé" a été imaginé pour effectuer les mesures dans des conditions stabilisées (vitesse, distance entre les deux voitures, quantité d’eau déversée sur la piste). Résultat : il est apparu que, sous certaines configurations, les projections d’eau pouvaient être bien supérieures à celles occasionnées par une forte pluie, notamment sous capot. Ces premières conclusions seront complétées par d’autres campagnes de mesures impliquant différents types de voitures (berline, break…). La base de données ainsi constituée servira à modéliser et à mettre au point les simulations de projections d’eau en soufflerie. Les constructeurs automobiles, tel PSA, pourront ainsi plus facilement intégrer ces phénomènes dans les tests de mise au point des véhicules.

Recherche : une thèse pour étudier la dispersion des gouttes d’eau dans l’air

Le 16 décembre 2008, Sylvain Aguinaga soutenait une thèse intitulée "Dispersion turbulente et déposition de gouttes d’eau ; expérimentation et modélisation numérique". Ces travaux de haut niveau intéressent particulièrement l’industrie automobile.

La dispersion turbulente et la déposition des gouttelettes d’eau ont fait l’objet de la thèse de doctorat de Sylvain Aguinaga. Son étude a porté sur la mise en place d’expérimentations et de simulations numériques pour mieux caractériser les écoulements diphasiques, à savoir ceux associant une phase gazeuse à une phase liquide dispersée. Plusieurs partenaires ont soutenu ce travail mené dans le cadre d’une convention CIFRE(1). Deux entités du CNRS (Laboratoire d’études aérodynamiques de Chasseneuil-Futuroscope(2) et Institut de mécanique des fluides de Toulouse(3)), le CSTB ainsi que le groupe automobile PSA ont été impliqués. Ce dernier s’est révélé particulièrement intéressé par ces travaux permettant de modéliser de manière plus fidèle les phénomènes aérodynamiques auxquels se trouvent confrontés les véhicules circulant par temps pluvieux.

Un banc d’essai à "expansion brusque"
La recherche menée par Sylvain Aguinaga s’est déroulée en trois temps : analyse de la bibliographie afin de définir l’état des connaissances, développement et utilisation d’un banc d’expérimentation, dit à "expansion brusque", afin d'acquérir des données de référence pour finalement, tester de nouvelles voies de modélisation numérique. "Nous avons pu analyser l’écoulement aérodynamique, ainsi que les mécanismes de dispersion et de déposition des gouttelettes d’eau au voisinage des parois du tube du banc d’essai, explique Jean-Paul Bouchet, qui a accompagné cette thèse pour le CSTB. Plusieurs vitesses d’écoulement et types d’expansion ont été testés. Une méthode optique par fluorescence UV a parallèlement été développée. En incorporant un traceur qui réagit aux ultraviolets dans les gouttelettes d’eau de 40 µm émises par un atomiseur ultrasonique, il est possible de quantifier le taux de déposition en différents points du banc d’essai." Et, par la même occasion, de mieux comprendre le comportement des gouttelettes au regard de l’écoulement de l’air et de valider les modélisations développées.

1 - Convention industrielle de formation par la recherche
2 - Jacques Borée, du LEA, a dirigé la thèse de Sylvain Aguinaga
3 - Olivier Simonin, pour l'IMFT, a largement contribué à ces travaux