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Les moisissures n’ont qu’à bien se tenir !

Jusqu’à présent, détecter une contamination fongique revenait à rechercher les développements visibles, les odeurs suspectes ou encore les signes d’humidité. Il était également possible de prendre des échantillons d’air, puis d’identifier et compter les moisissures cultivables. Repérage tardif, contaminations non visibles : aucune technique globale ne permettait d’arrêter une contamination avant que des dégâts irréparables ne soient constatés. La technologie de détection des moisissures mise au point par le CSTB va améliorer la situation…

Les moisissures, quelles qu’elles soient, émettent des COV (composés organiques volatiles) dès le début de leur développement. Ces derniers ont la particularité de traverser les parois et d’être détectables par des capteurs, au bout de deux jours seulement ! Ce sont sur ces indicateurs chimiques spécifiques de la croissance fongique que le CSTB s’est basé pour mettre au point un indice de contamination cachée et récente. Il a par la suite été testé dans le cadre de la campagne Logements menée par l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI).

Les moisissures dans l’habitat sont des moisissures bien spécifiques qui ne correspondent pas forcément à celles retrouvées dans les monuments historiques. Le CSTB a été obligé de reprendre l’indice des logements pour pouvoir l’adapter à chacun des lieux sur lequel il a travaillé : musées, bibliothèques, châteaux… Des tests in-situ ont pu être effectués dès la fin de l’année 2008 ; ils se poursuivront jusqu’en août prochain. Une grotte ornée de dessins préhistoriques a notamment pu bénéficier de cette nouvelle technologie. "Nous nous sommes rendus compte que les COV émis par les moisissures étaient absorbés par la terre au sol. Nous avons dû contourner ce problème en trouvant des COV ayant une durée de vie intéressante pour pouvoir les capter," explique Stéphane Moularat, ingénieur spécialisé au CSTB. La détection des moisissures via leurs émissions chimiques permet d’intervenir très en amont sur les œuvres et de proposer des solutions de réparation efficaces. Des mesures ont été effectuées avant et après le traitement du LRMH (par grattage des moisissures) et ont démontré la disparition des moisissures avant qu’elles n’aient eu le temps de s’étendre à toute la grotte !

Fort de son expérience, le CSTB est prêt à mener des dépistages "pilotes" sur d'autres "terrains" que les monuments historiques ou les logements, par exemple dans le secteur hospitalier, les bâtiments d'archives, les locaux de process industriels (agro-alimentaire, cosmétique, pharmaceutique…) ou divers lieux de travail. Qu'on se le dise !

Contamination par un basidiomycète : effondrement d’une partie des plafonds - Mesure des COV
Dégradation d’une grotte - Crédit : Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques
Crédit : Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques

Un brevet national, bientôt international

Cette technique de détection complètement novatrice a vu le jour en 2005, alors que Stéphane Moularat faisait sa thèse. En mars 2007, le chercheur et le CSTB ont décidé de faire breveter l’indice (pour les logements et les différents lieux historiques) en France. Publié dans plusieurs revues internationales, l’indice a suscité l’intérêt de nombreux pays. Un engouement qui a incité le CSTB et Stéphane Moularat à passer à une phase internationale du brevet d’ici septembre 2009. "Il s’agit de valoriser cet indice auprès d’un public international afin d’élargir son champ d’actions," explique Stéphane Moularat. Nul doute que les moisissures installées dans les lieux historiques ont du souci à se faire…