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La tour Franklin à Montreuil se reconstruit une image

Les objectifs de la rénovation lourde de la tour montreuilloise étaient nombreux. En prenant en compte les principes d’aménagements du "cœur de ville" initié par la municipalité il y a une dizaine d’année d’après les plans d’Alvaro Siza, tous les ouvrages du socle périphérique qui grevaient la relation du bâtiment à son environnement ont été démolis. Un patio arboré a été creusé en pied afin d’ouvrir les espaces de restauration du sous-sol à la lumière naturelle. Les plateaux de bureaux ont également été reconfigurés. Non moins efficace, la conception astucieuse d’une enveloppe performante a converti l’ensemble des superstructures aux goûts et aux usages d’aujourd’hui. Les murs rideaux se sont substitués aux fenêtres en bandes verticales pour des gains de luminosité évidents. Naguère forteresse imprenable, la tour rénovée a retrouvé son urbanité.

L’idée des architectes Bruno Jean Hubert et Michel Roy consistait à réaliser des façades parfaitement continues et les plus ouvertes possibles sur la ville. L’entreprise en a assuré la conception et la mise en œuvre de type cadre en masquant les poteaux de structure en béton qui filaient en saillie sur toute la hauteur des façades d’origine.

Des cadres aluminium de faible épaisseur

Manuel Montès et Jacky Favrou, responsables de l’exécution du marché pour Ouest Alu, expliquent que le choix d’une typologie de façade avec une lame d’air respirante (en contact avec l’extérieur au moyen d’orifices munis de filtres perméables à la vapeur d’eau) s’est naturellement imposé. "Les blocs préfabriqués en usine, dont les hauteurs correspondent à ceux des étages, ne devaient pas se déformer sous l’action des différences de pression d’air entre l’extérieur et l’intérieur de la lame d’air. Un équilibre de pression était nécessaire. A défaut, les façades auraient présenté des reflets dus aux déformations des verres", développe Jean-Louis Galéa, responsable de l’Appréciation Technique d’Expérimentation pour le CSTB. L’épaisseur des cadres en aluminium thermolaqué a par ailleurs pu être réduite au minimum. Manuel Montès précise : "Une simple ventilation de la lame d’air, avec des entrées et sorties d’air en haut et en bas de celle-ci, n’aurait jamais permis de réaliser une masse de pareclose extérieure visible de 85 mm pour un joint creux de 20 mm seulement !"

Pour mener à bien cette entreprise de mise aux normes de confort acoustique et thermique, les allèges en béton et les vieilles menuiseries ont évidemment été supprimées. Tous les nez de plancher ont été rallongés jusqu’au nu extérieur des poteaux. Les blocs de 3,30 m de haut, constitués d’un verre extérieur monolithique durci de 10 mm et d’une paroi isolante intérieure en vitrage feuilleté, ont ensuite été fixés au moyen de pattes en acier réglables dans les 3 dimensions en recouvrement des ouvrages en béton des années 70.

Au final, la nouvelle peau ne laisse à première vue rien deviner de l’aspect brutaliste d’origine. L’illusion d’un bâtiment entièrement neuf est presque parfaite. Les anciens poteaux, mis en couleur et perceptibles en arrière plan des nouveaux vitrages, restent le seul clin d’œil au passé. Ils participent par un jeu de transparence à l’animation de façades planes et lisses, auxquelles ils rendent un peu de profondeur. Une profondeur qui achève l’inscription de l’IGH dans son espace urbain.

Zoom sur le vitrage respirant

Michel Thomas, ingénieur au CSTB, a été le premier à décrire dans les années 80 les principes de respiration des vitrages. L’idée de la technique repose sur la mise en communication de la lame d’air avec l’ambiance extérieure. Mais à la différence du vitrage ventilé, les échanges avec l’extérieur se limitent à l’évacuation de la vapeur d’eau. Il n’y a pas de circulation d’air. La lame d’air du vitrage respirant constitue un caisson étanche aux poussières. Le système fonctionne de manière naturelle grâce à un gradient thermique entre l’intérieur et l’extérieur. Des filtres avec une maille de quelques centaines de microns seulement permettent ce rééquilibrage hygrométrique, le taux d’humidité extérieur étant sous nos climats en général plus faible que celui présent à l’intérieur de la lame.

Principaux avantages de la technique de respiration des vitrages ? Une meilleure isolation thermique et acoustique grâce à une lame d’air plus épaisse ; absence d’impureté à l’intérieur de celle-ci ; absence de déformation des verres de grande dimension sous l’effet des différences de pression entre l’intérieur de la lame d’air et l’extérieur du bâtiment.

Mais il y a un revers à la médaille : les défauts d’étanchéité à l’air ou une trop grande perméabilité à la vapeur d’eau peuvent provoquer de gros problèmes de condensation. Raison pour laquelle le CSTB a réalisé des essais dans son laboratoire de Champs-sur-Marne selon des protocoles bien établis. La vérification des prototypes, qui a permis de vérifier l’absence de condensation dans la lame d’air, s’est opérée dans des conditions très défavorables de fonctionnement (surpression intérieure et baisse de température à raison de 3°C/heure, à partir de 20°jusqu’à 0°C).

Fiche technique

  • Maîtrise d’ouvrage : CEREP France B
  • Maîtrise d’œuvre d’exécution : MEUNIER IMMOBILIER D’ENTREPRISE
  • Maîtrise d’œuvre : HUBERT & ROY, architectes
  • Façadier : OUEST ALU
  • BET façades : PELTIER SA
  • Bureau de contrôle : SOCOTEC
  • SHON : 42.600 m² sur 26 étages
  • Livraison prévue : début 2009
Coupe (en haut à gauche) et vitrage passant devant les poteaux béton (en bas à droite) - Cliquez sur la photo pour l'agrandir