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Nouvelle Réglementation Thermique dans l’existant : décodage

Vaste chantier en perspective ! Plus de 30 millions de logements (publics et privés) ainsi que 875 millions de m² de bureaux sont potentiellement concernés par la nouvelle RT dans l'existant Ces bâtiments, construits pour la plupart avant 1975, alors qu'aucune réglementation thermique n'encadrait leur construction, sont aujourd'hui largement responsables des émissions de gaz à effet de serre et de la surconsommation d’énergies non renouvelables. Il y a donc urgence à les mettre aux normes pour en maîtriser la consommation énergétique, conformément aux engagements pris au niveau international pour la lutte contre le changement climatique. Pour y parvenir, la rénovation du bâti existant est l'un des objectifs prioritaires de la France dans le secteur du bâtiment dont "la politique énergétique s'articule autour de trois axes majeurs : réglementer, sensibiliser (les particuliers comme les professionnels), inciter", comme l'a souligné Marie-Christine Roger, chef du bureau de la qualité technique et de la prévention à la DGUHC(Direction Générale de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Construction), en préambule à cette 9e journée interrégionale d'information.

Huit points clés

Rappelons que la RT dans l'existant est dénommée RT "élément par élément" lorsqu'elle s'applique à des superficies inférieures à 1 000 m² et si le montant des travaux est inférieur à 25 % du cout de la construction En vigueur depuis le 1er novembre 2007, elle vise ; d'une part, à améliorer la performance énergétique des bâtiments anciens lorsque ceux-ci font l'objet de travaux de rénovation, d'amélioration, de remplacement ou d'installation ; d'autre part, à limiter l'utilisation de la climatisation, maintenir le niveau de confort d’été et préserver la qualité du patrimoine bâti.

Pour cela, la RT impose des exigences sur les produits, les équipements, les ouvrages et les systèmes installés ou remplacés sur les points-clés suivants : l'isolation des parois opaques et vitrées, le chauffage, le refroidissement, l'eau chaude sanitaire, la ventilation mécanique, l’éclairage, les énergies renouvelables. Pour aider les maîtres d'ouvrage et d’œuvre à respecter les nouveaux textes réglementaires, des moyens et outils ont été largement expliqués par les spécialistes, notamment Jean-Roger Millet, responsable de la division Energie du CSTB qui a résumé la logique du dispositif mis en place par cette formule : "Apporter ce qu'il faut, où il faut, quand il faut !" Tel est l'esprit de la réglementation : pointer du doigt tout ce qui va permettre de maîtriser la consommation énergétique, élément par élément. En revanche, pour la RT "élément par élément", il n'y a pas obligation d'effectuer des travaux, mais seulement de respecter efficacité énergétique minimale pour les travaux décidés par le maître d'ouvrage. Dans certains cas et conditions très spécifiques, des exigences sont imposées sur certains éléments, même si les travaux n’étaient pas décidés.

Priorité à l'isolation

Avant d'installer le chauffage, l'isolation thermique est le premier poste à améliorer ou à remplacer pour réduire les déperditions de chaleur (voir encadré).

Pour ce qui concerne l'isolation des parois opaques, les exigences réglementaires en cas de travaux ne concernent que des types bien identifiés : les murs en béton banché, blocs béton, briques industrielles bardages métalliques les planchers bas en terre cuite ou béton et tous les types de toitures. L'association paroi existante / isolant doit présenter une résistance thermique (R) minimale. A noter que la résistance thermique exprime l'efficacité de la paroi ; elle figure sur l'emballage des produits marqués CE ou certifiés Acermi, NF, CSTBat. Par exemple, pour un plancher de combles perdus isolé avec de la laine minérale ou de la cellulose soufflée 18, l'idéal est d'arriver à R =4,5 m² ou 5m² K/W pour obtenir une bonne isolation. Les exigences et les solutions possibles variant selon la situation géographique du bâtiment (l'Hexagone étant découpé en trois zones H1, H2 ou H3).

Quant aux parois vitrées, les exigences portent sur les fenêtres, portes-fenêtres et façades rideaux, à l'exception des verrières, vérandas non chauffées, des vitrines... Une double exigence de performance thermique minimale est requise sur le vitrage et la fenêtre (menuiserie + vitrage), la mise en place de volet est valorisée. Par exemple, pour des fenêtres coulissantes le coefficient Uw (Uwindow) exigé doit être inférieur ou égal à 2,6 W/m²K. A noter que plus le coefficient U est faible, plus l'isolation est performante. La mise en place d'entrées d'air peut également être imposée pour ne pas dégrader la ventilation.

Rénover le chauffage : trois possibilités

Un système de chauffage est composé de trois éléments : un générateur, un circuit de distribution et des émetteurs. Pour chacun d'eux, des exigences sont spécifiées en cas de remplacement, de modification ou d'installation.

  • A la production de chaleur : lorsqu'elle est générée par des chaudières à gaz ou à fioul, elles doivent avoir un rendement minimal. Les chaudières à basse température ou à condensation sont réputées satisfaire cette exigence. Un appareil de régulation / programmation du chauffage est en outre obligatoire. "En effet, la RT impose ici les systèmes de régulation, alors qu'elle ne contraint pas à faire des travaux, souligne Jean-Roger Millet. Les adaptations sont possibles, car toute la difficulté dans l’élaboration des textes à consisté à savoir jusqu’à quel point il fallait imposer ; nous avons donc établi des règles objectives, cherché à simplifier sans pour autant être simplistes. Une certaine souplesse a parfois été accordée, ici par exemple sur les conduits d’évacuation."
    Sur l'option "pompes à chaleur", les exigences portent sur un coefficient de performance (COP) minimal en mode chauffage égal à 3,2 au sens de la norme NF EN 14 associé à une isolation minimum.
  • Au niveau des circuits de distribution : réseaux et tuyauteries doivent impérativement être calorifugés avec une isolation minimum de classe 2.
  • Sur les différents émetteurs, s'ils sont remplacés ou installés : radiateurs à eau, électriques, plancher à eau chaude ou électrique… avec obligation de régulateurs, thermostats ou d'un dispositif raccordé à une sonde extérieur. "Dans tous les cas, il s'agira de bien adapter l’émission de chauffage aux besoins du local parfaitement évalués au préalable."

En ce qui concerne la production d'eau chaude sanitaire, il est à noter que, lors de l'installation ou du remplacement du chauffe-eau, les exigences sont les mêmes que celles fixées aux bâtiments neufs et portent sur des pertes minimales. Par exemple, les accumulateurs ou chauffe-bain gaz doivent êtres conformes à la norme EN 89 ou EN 26.

Retour au bon sens pour le refroidissement

Cette réglementation œuvre pour le non-recours à la climatisation en maintenant des protections solaires extérieures des fenêtres, portes-fenêtres et façades-rideaux lorsqu'elles existent et en obligeant à installer des protections solaires mobiles efficaces sur les fenêtres de toit installées ou remplacées. La réglementation n'interdit pas la climatisation. Si cette dernière est vraiment nécessaire, la RT impose d’équiper les baies non orientées au nord des locaux refroidis par des protections solaires efficaces (mobiles en résidentiel) et d'installer des systèmes de refroidissement performants. Les climatiseurs domestiques d'une puissance inférieure ou égale à 12 kW doivent appartenir aux classes A ou B uniquement ; les autres équipements supérieurs à 12 KW doivent avoir un coefficient d'efficacité énergétique EER minimal.

Pour la ventilation mécanique, les exigences portent sur les performances de consommation des caissons de ventilation ainsi que sur le système à installer ou à remplacer dans sa totalité dans le respect des réglementations d'hygiène. La performance maximale est la même que celle fixée pour le neuf, à savoir, par exemple, de 0,25 Wh/m3 par ventilateur, dans le résidentiel, 0,30 Wh/m3 dans le parc non résidentiel. Dans ce dernier, il est de plus vivement recommandé d’’éviter les consommations en continu 24h/24, 7 jours sur 7 ! Ainsi, dans une surface supérieure à 400 m², y a–t-il obligation d'un dispositif de gestion automatique des débits de ventilation en fonction de l'occupation des locaux (horloge…).

Un éclairage judicieux pour le non résidentiel

"Eclairer où il faut, quand il faut… La formule vaut aussi pour l’éclairage non résidentiel", déclare l'expert du CSTB. La réglementation s'applique uniquement lors du remplacement ou de la rénovation des éclairages sur plus de 100 m² de locaux. "Avec le choix entre deux approches, précise-t-il, soit en utilisant des produits performants, soit en faisant le calcul de l'efficacité globale de l'installation suivant la typologie des locaux bureaux, écoles..)."

Une seule énergie renouvelable réglementée

Bien que l’élément primordial pour améliorer l'efficacité énergétique d'un bâtiment consiste à utiliser les énergies renouvelables (8e point-clé) pour le faire fonctionner et le chauffer, la réglementation n'impose rien dans ce domaine. Seules les chaudières à bois sont pour l'heure concernées, avec un rendement minimal imposé en fonction du matériel installé. A titre d'exemple, pour une chaudière à bois de 30 kW, le rendement doit être de classe 1 selon la norme NF EN 303-5 ; pour un foyer fermé ou un poêle à bois, le rendement doit être supérieur à 65% (60% jusqu'au 30 juin 2009).

RT globale pour les bâtiments de plus de 1 000 m²

La réglementation dite "RT globale" s'applique aux bâtiments respectant simultanément les trois conditions suivantes : surface hors œuvre nette (SHON) supérieure ou égale à 1 000 m² ; coût des travaux de rénovation thermique supérieur à 25% du coût de la construction fixé par l'arrêté du 20 décembre 2007; date d'achèvement de la construction du bâtiment postérieure au 1er janvier 1948.

Les travaux de réhabilitation thermique portent sur l'enveloppe, les installations de chauffage, de production d'eau chaude, de refroidissement, de ventilation et d'éclairage, c'est-à-dire tous les éléments qui ont un impact direct sur l'efficacité énergétique. Les objectifs de la RT globale sont proches de ceux de la RT 2005, mais elle ne se base pas sur le coût final des travaux mais sur une estimation: "Le principe d’équivalence prévaut ici, souligne Jean-Roger Millet. Les coûts des travaux doivent permettre de mettre le bâtiment au même niveau qu'un bâtiment neuf. Mais il est bon de rappeler que la réglementation ne décrit pas le maximum à faire mais le minimum à respecter."

Moyennes des déperditions énergétiques d’une maison d’avant 1975 non isolée*

  • Fenêtres : 10-15 %
  • Mur : 20-25% (extérieur) 15% (mitoyen)
  • Toit : 25-30 %
  • Ventilation et infiltrations : 20-25 %
  • Plancher bas : 7-10% (sol)
  • Ponts thermiques : 5-10%
  • 43 % de l’énergie consommée en France provient des bâtiments, soit 22% des rejets des gaz à effets de serre

* Source ADEME

Un exemple de rénovation

Myriam Humbert, chargée d’études CETE ouest, a présenté trois exemples types de rénovation de maisons individuelles de 100 m² construites entre 1948 et 1974, représentatives des trois âges de la construction de l’après-guerre jusqu’à la RT de 1974, situées dans des zones géographiques différentes. Par les exemples présentés, celui d'une maison en zone H1, décrite par la spécialiste comme une "épave thermique énergivore" classée G.

La rénovation a porté sur quatre éléments parmi les huit de la réglementation :

  • La chaudière à fuel a été remplacée par une chaudière à bois bûches + hydro-accumulation avec ballon ECS
  • Les fenêtres par du double-vitrage (U = 2,30 W/m²K) + rajout de volets
  • Les parois opaques ont été isolées
  • La toiture a fait l'objet d'une isolation de la toiture.

L'investissement ? Entre 16,5 et 19k€. "Plusieurs classes énergétiques ont été gagnées après chaque étape, précise Myriam Humbert. Cette rénovation s’est faite au coup par coup pour atteindre, à la fin de tous les travaux, la classe D seulement. Or, il vaut mieux programmer les groupes de travaux globalement pour atteindre la performance plus rapidement. Mai, si l’on est obligé d’étaler les travaux, il est alors préférable de les faire localement en commençant par l’isolation de la toiture plutôt que par le remplacement de la chaudière."

Source : DGUHC/COSTIC - Janvier 2008