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Tour sous contrôle

La tour de contrôle nord fait partie de ces constructions que l'on pourrait nommer "industrielles" et qui ne recueillent pas toujours l'attention qu'elles méritent. L'ouvrage de l'aéroport de Roissy fera mentir cette idée préconçue, tant il a été esthétiquement travaillé. Comme sa petite sœur, la tour Sud, haute de 80 m, cette tour Nord, haute de 100m est enserré dans un carcan de verre. Une tour de contrôle reste une construction très basique : un fût de béton surplombé d'une vigie. Ici pourtant, l'érection de cette tour de trente étages est une prouesse de gros œuvre. La technique du coffrage glissant a permis d'élever le fût à 100 mètres de haut, au rythme de 15 centimètres par heure. Grâce à la prise rapide du béton (6 heures après le coulage), le mouvement du coffrage est facilité ; il est maintenu par un ferraillage connecté à la base de l'ouvrage. La plate-forme au sommet est fixée sur des tiges de métal positionnées au fur et à mesure dans le béton depuis la base de la tour, avec une montée assurée par vérins. Cette technique est celle communément utilisée pour la construction des cheminées d'usine et autres châteaux d'eau.

Un fût en béton recouvert d'une double peau vitrée

Le fût, creux à l'intérieur, est revêtu d'une façade double peau ventilée en verre sérigraphié, une sorte de sur-façade qui court de bas en haut du fût. Ainsi que l'explique l'architecte de l'opération, « la complexité d'un tel chantier vient de son exiguïté car un cylindre laisse bien peu de place pour travailler. En même temps, il est extrêmement difficile de rattraper un défaut sur la façade, d'où la nécessité d'une mise en œuvre parfaite. » Trois zones se dévoilent : la partie courante du fût, la vigie annexe située à mi parcours du fût et la vigie principale, en surplomb du fût.

La demande d'ATEx avait pour objet la réalisation des façades vitrées du fût et des vigies. De conception VEC, les vitrages sont de type monolithique pour les zones d'habillage du béton du fût, en tri-feuilleté sur la vigie principale (qui correspond à la partie conique de la tour de contrôle) et la vigie annexe, en double vitrage feuilleté pour le local technique situé sous la vigie principale. La surface totale de l'ensemble des façades visées par l'ATEx est de l'ordre de 2 950 m².

A l'exception de la vigie principale où les vitrages sont en forme, les vitrages sont rectangulaires (2 280 x 1 565 mm). La structure secondaire en alliage d'aluminium est constituée d'un réseau de profils porteurs verticaux fixés au béton du fût ou de la charpente métallique de la vigie principale. Les cadres, sur lesquels sont collés les vitrages, sont accrochés pour l'essentiel de la façade en quatre points selon un système de type "ergot", sur des axes traversant les profils porteurs, ce qui permet ainsi un montage de l'extérieur sans intervention de l'intérieur. Les dispositions constructives retenues par la société Laubeuf, adjudicataire du lot façades, permettent le changement d'un cadre, l'étanchéité, l'absorption des déplacements dus aux effets de température et celle des déplacements de la charpente de la vigie principale sous charges climatiques et enfin, une ventilation assurée du volume entre le béton et la façade vitrée du fût.

Pour le fût, la trame courante des châssis est de 1,57 m de large et d'environ 2,30 m de haut, la hauteur du fût comprenant 21 trames de 3,50 m et 4 trames variables, l'épaisseur du vitrage étant pour sa part de 10 mm minimum.

Vision maximum pour les contrôleurs

Les contrôleurs aériens doivent évidemment bénéficier d'une vision optimale des pistes. Les montants, traverses ou raccords séparant les volumes de vitrages devaient être les plus fins possible. Les joints horizontaux entre les vitrages des façades du fût devaient être sans saillie, sans profil ni protubérance, afin d'obtenir un revêtement lisse, sans point de concentration de salissures. L'effet recherché est clair : obtenir un rideau de verre continu du haut en bas de l'ouvrage. La façade ventilée du fût permet de limiter l'échauffement des matériaux mis en œuvre. La ventilation réalisée par groupe de deux hauteurs de châssis s'effectue au niveau des joints horizontaux par la mise en œuvre de chicanes qui permettent de respecter le hors d'eau et d'assurer une alternance entre les prises d'air et les rejets. L'ossature des façades a pour fonction de suspendre les ensembles vitrés. L'ensemble des éléments métalliques présents entre la façade et le fût est protégé contre la corrosion, comme s'ils étaient situés en extérieur. « Pour la vigie principale, les profilés métalliques assurent le contreventement et la reprise des charges, fonction qui, réglementairement, ne peut être assurée par les verres eux mêmes, explique Georges Chailleux, chef du bureau d'études chez Laubeuf. Sur la vigie principale, la résistance à la pression de charge peut aller jusqu'à 2000 Pa, soit une résistance à des vents de 200 km/h. »

15 degrés de pente

La façade de la vigie principale se compose d'ensembles vitrés multi-feuilletés plans teintés insérés dans une ossature métallique. Ils prennent la forme de trapèzes égaux et inclinés suivant un angle de 72 degrés entre la ligne de plus grande pente et l'horizontale. La pente atteint 15 degrés pour des vitrages qui assurent une véritable contre-plongée sur les pistes. Les angles d'intersection des plans de vitrages sont, quant à eux, constants. Ils sont conçus pour être posés par montage depuis l'extérieur de l'ouvrage et fixation mécanique par l'intérieur de l'ouvrage.

Ainsi que le précise le chef de chantier de Laubeuf en charge de la pose des éléments verriers, « si douze minutes à peine suffisaient pour monter un pan de verre du bas de l'édifice jusqu'à la vigie principale, il fallait deux heures pour le fixer, sachant qu'un vent supérieur à 30 km/h empêchait toute intervention. » Chaque montant vertical de façades comporte ainsi les rails guides extérieurs continus, qui serviront pour le guidage ultérieur de la nacelle d'entretien et de maintenance. Les ensembles vitrés en place sur la vigie principale constituent les garde-corps de protection et ce, indépendamment des câbles de protection. La fixation des cadres VEC sur les montants nécessite en revanche, contrairement aux vitrages des parties courantes du fût, une intervention de l'intérieur, les flans de cadre ne comportant pas d'ergots mais un perçage tous les 500 mm afin de permettre le passage des vis de fixation. Le poids du cadre supérieur d'une hauteur de 4,8 m est repris par les équerres de la charpente.

Le lot façade aura été livré entièrement mi-juillet, soit presque dix mois après le début de montage des ouvrages vitrés.