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Partenariat public / privé - Nouveau moyen d'exercer la commande publique

Stade de France
Stade de France

Désormais, en France, le partenariat public / privé (PPP) est régi par quatre textes : la loi du 29 août 2002 sur la sécurité intérieure (pour les établissements de police et de gendarmerie), la loi du 9 septembre 2002 pour le secteur de la justice (établissements pénitentiaires), l'ordonnance du 4 septembre 2003 sur les établissements publics et de santé et l'ordonnance du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat tous secteurs. « Le PPP, explique Jean Carassus, responsable du département Économie et Sciences Humaines au CSTB, est désormais la troisième possibilité offerte à une autorité publique, avec les contrats séparés définis par la loi sur la maîtrise d'ouvrage publique (loi MOP) et les délégations de service public. Il permet en effet à la puissance publique de passer un contrat global de partenariat avec un consortium privé pour le financement, la conception, la réalisation et la gestion (pendant plusieurs dizaines d'années) d'un bâtiment public. L'autorité publique (État, collectivité territoriale) échelonne ainsi les dépenses dans le temps, car le consortium privé se fait payer après la livraison de l'ouvrage sous forme d'un loyer pendant la durée du contrat. Les délais de réalisation sont en général plus rapides. »

Multiples compétences du CSTB

Concernant le PPP, une équipe CSTB du département Économie et Sciences humaines, composée de Marc Colombard-Prout, responsable du laboratoire Services, Process, Innovation, de Frédéric Bougrain, chercheur au sein de ce laboratoire, et du responsable du département, a acquis une réelle compétence. Elle finalise une recherche cofinancée avec le Plan Urbanisme Construction et Architecture (PUCA) sur une douzaine de cas de PPP dans quatre pays européens (Royaume-Uni, Italie, Danemark et France) afin de tirer des enseignements sur la mise en œuvre du PPP en France. Ensuite, l'Institut de la Gestion Déléguée (IGD), présidée par Claude Martinand (Vice-président du Conseil Général des Ponts et Chaussées) a fait appel à l'équipe pour assurer le secrétariat technique du rapport de l'IGD sur l'évaluation des contrats PPP. A cette occasion, le CSTB a élaboré un cadre de comparaison entre la solution publique et la solution en PPP*. Enfin, la Mission d'Appui à l'Investissement Hospitalier du ministère de la Santé lui a confié la mise au point du comparatif solution publique / solution PPP pour la construction d'hôpitaux dans le cadre du plan "Hôpital 2007".

Bilan d'étude de cas européens

L'étude de douze cas, trois au Royaume-Uni, quatre en Italie, quatre en France et un au Danemark, a permis d'établir un premier bilan. L'objet de la recherche n'est pas de comparer les avantages et les inconvénients du PPP et de la loi MOP. Il est de mettre en évidence, quand la solution PPP est choisie, les conditions, méthodes et outils nécessaires pour un rapport équilibré entre le partenaire public et privé et une bonne qualité du service rendu à l'utilisateur final. Contrairement aux idées reçues, notent les experts, pour faire du PPP, il faut que le commanditaire public soit fort, compétent et entouré de conseils de haut niveau. « Il doit savoir bien piloter toutes les étapes, de la commande à la gestion, souligne Jean Carassus. Il doit préciser exactement la nature de sa commande, tant pour les fonctionnalités du bâtiment que pour la qualité de la gestion attendue et il doit être capable d'avoir une position claire sur la qualité architecturale. »  Autre enseignement : parler de généraliser le PPP n'a aucun sens. Le PPP restera très minoritaire dans l'investissement public. Au Royaume-Uni, où son application est la plus forte, le PPP représente, selon les années, de 11 à 14 % de l'investissement public. Le commanditaire public doit impérativement bien maîtriser les rouages du PPP et voir clair dans les résultats attendus. Il doit déléguer de manière raisonnable au secteur privé, lequel doit bien maîtriser lui-même ses risques. Le lien entre conception, réalisation et gestion est également primordial. L'architecte et l'entrepreneur doivent dialoguer avec les utilisateurs et les gestionnaires futurs de l'ouvrage. « Le potentiel d'innovation est important, du fait de cette remontée d'informations de la gestion du bâtiment vers la conception, avec une préoccupation de coût global », précise Jean Carassus.

D'après l'architecte Michel Macary, qui a notamment réalisé en PPP le Stade de France et l'hôtel de Police de Strasbourg, « ce dialogue à trois (maître d'ouvrage gestionnaire, architecte et entrepreneur) est beaucoup plus intéressant que le rapport architecte - entrepreneur général dans le cadre d'un contrat conception - réalisation. » Au-delà de l'ouvrage physique réalisé, qu'il soit prison, hôtel de police ou hôpital, c'est le service rendu par l'ouvrage qui devient essentiel. « Cette recherche met en évidence l'apprentissage possible, pour l'autorité publique, issu du PPP pour mieux appliquer la loi MOP, concluent les experts. Bien utilisé, le PPP apprend à être précis dans la commande, définir un service attendu, associer les utilisateurs à la conception, trouver des solutions pour raccourcir les délais et améliorer la qualité de la gestion. »

* Ce rapport a été publié dans un supplément du Moniteur du 26 mars 2004 (n°52-35).

Hôpital 2007 : solution publique ou PPP ?

Le CSTB est en train d'élaborer une méthode opérationnelle de comparaison entre solution publique et solution privée pour le financement, la conception, la réalisation et la gestion des hôpitaux. Il s'est inspiré des méthodes comparatives développées en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas et en Australie. Il travaille avec les responsables de la Mission d'Appui à l'Investissement Hospitalier (MAINH) du ministère de la Santé mobilisés par le projet d'investissement en PPP de nouveaux établissements hospitaliers : 25 projets sont en cours de définition pour un montant total de 1,2 milliard d'euros.

Le CSTB a élaboré une méthode de travail en neuf étapes :

  1. délais prévisionnels ;
  2. coûts d'investissement et d'exploitation ;
  3. identification et chiffrage des risques ;
  4. coût du financement ;
  5. différentiel de valeur actuelle nette entre les deux solutions ;
  6. impacts sur la capacité de financement de l'hôpital ;
  7. impacts sociaux et économiques de l'investissement ;
  8. aspects qualitatifs ;
  9. appréciation globale des deux solutions. Cette analyse fera l'objet d'un guide qui sera mis à la disposition des directeurs d'hôpitaux pour la mise en œuvre du PPP.

D'après l'architecte Michel Macary, architecte du Stade de France et de l'hôtel de Police de Strasbourg en PPP, « le dialogue à trois maître d'ouvrage gestionnaire, architecte et entrepreneur est très profitable au projet ».