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Nouvelle donne pour les isolants thermiques

Toutes les familles de produits couvertes par la Directive Européenne "Produits de Construction" (89/106/CEE) vont progressivement être revêtues du marquage CE sur la base de spécifications européennes (agréments techniques européens ou normes harmonisées européennes). Les premières normes européennes relatives aux isolants thermiques ont été publiées en tant que normes harmonisées : l'obligation  de marquage CE est désormais effective pour ces familles de produits ; tous les produits d'isolation thermique manufacturés, tels que visés par les normes EN 13162 (Produits manufacturés en laine minérale) et 13 164 (Produits manufacturés en mousse de polystyrène extrudé), doivent être marqués CE depuis mai 2003.

L'ensemble de la filière (poseurs, distributeurs, prescripteurs et fabricants d'isolants thermiques) est donc touché par les changements introduits par ces nouvelles normes dans la caractérisation des produits isolants. Pour répondre aux questions des professionnels concernés par les isolants thermiques, une journée technique d'information était organisée le 6 juillet dernier dans le cadre de l'Espace Construction. Rappelons que ce dernier a été créé par le CSTB, le CTBA (Centre Technique du Bois et de l'Ameublement) et le LNE (Laboratoire National d'Essais) à l'attention des industriels et professionnels français du Bâtiment, afin de proposer une politique commune et de favoriser l'ouverture sur le marché européen de la construction.

Marquage CE : quelle signification ?

Depuis l'année 2000, les industriels ont préparé le passage au marquage CE avec de nouvelles modalités d'essais et de mesures, ainsi qu'un ajustement des spécifications de production, afin d'offrir les mêmes performances que dans le système national antérieur. Le marquage CE est obligatoire. Il indique que le produit satisfait les dispositions réglementaires qui autorisent sa commercialisation et notamment que le fabricant déclare que son produit est conforme aux spécifications techniques européennes qui lui sont applicables. Un produit isolant ainsi marqué est présumé apte à être utilisé dans le bâtiment en général. Sa prescription pour un emploi en particulier exige cependant de prendre connaissance de ses caractéristiques. Il faut rappeler que l'objectif de la DPC (Directive Produits de la Construction) est d'abord d'interdire l'accès au marché à des produits qui ne correspondraient pas à l'usage prévu et susceptibles de nuire à la sécurité des personnes.

Pour l'heure, les isolants thermiques marqués CE répondent surtout aux deux exigences essentielles de "sécurité en cas d'incendie" et "d'économies d'énergie et d'isolation thermique", mais sur une base déclarative pour les économies d'énergie.

Le marquage CE n'est pas une certification de produits et concerne a minima deux caractéristiques : d'une part, les euro-classes de réaction au feu ; d'autre part, la performance thermique (conductivité et résistance thermiques lambda et R). A noter que, le plus souvent, les euro-classes de réaction au feu A, B et C font l'objet d'un niveau d'attestation de conformité 1 (certification sans prélèvements en suivi). En aucun cas, il ne concerne l'aptitude à l'usage selon des emplois précis. Par ailleurs, les normes ne concernent pas encore les produits en vrac, les complexes de doublage et les produits de thermique industrielle. Ne sont pas non plus normalisés les produits couverts par un guide ATE (etics, vêtures, blocs coffrage), les produits de fibres naturelles végétales ou animales couverts par un CUAP (Common Understanding Approval Procedure), pour lesquels l'Agrément Technique Européen (ATE) permet d'obtenir le marquage CE.

Quelles évolutions de la certification ACERMI ?

L'ACERMI certifie les performances des produits isolants et les contrôle périodiquement. Cette certification intègre désormais les normes EN des produits et les méthodes européennes d'essais. Associée au marquage CE, elle offre au consommateur la garantie d'un contrôle de l'ensemble des caractéristiques par un organisme tiers indépendant des fabricants. L'ACERMI est également autorisée à délivrer la marque européenne Key Mark : elle est donc bien au cœur du dispositif européen.

Lorsque le marquage CE s'est mis en place, le référentiel de la certification ACERMI a évolué non seulement pour assurer son euro-compatibilité, mais aussi pour prendre en compte le contenu du marquage CE en vue de maintenir une exigence de qualité adaptée aux exigences et pratiques du marché français. Pourtant, malgré les demandes répétées des industries européennes de l'isolation et de l'État français, la Commission n'a pas retenu un niveau élevé d'attestation de la performance thermique, alors que les isolants répondent à deux exigences majeures d'une grande actualité : les économies d'énergie et l'environnement. C'est ce qui a conduit les industriels français à militer pour que l'ACERMI continue de certifier les caractéristiques thermiques déclarées dans le respect des normes européennes.

Si la clause type des polices d'assurance (portant sur la déchéance en cas d'inobservation inexcusable des règles de l'art telles que définies par les réglementations en vigueur, les DTU, les Avis Techniques, les règles professionnelles et les normes) ne rend pas tous ces éléments obligatoires, le marquage CE est, quant à lui, obligatoire. Pour sa part, l'ACERMI établit une passerelle entre les produits et les règles de mise en œuvre, car elle prend en compte les critères de choix des matériaux  retenus par les réglementations et DTU pour la réalisation d'ouvrages aux performances convenables.

Marquage CE et règles de l'art

L'arrivée du marquage CE oblige à adapter le corpus normatif et réglementaire portant sur les ouvrages et à veiller à ce que les règles de construction des ouvrages ne fassent pas obstacle à la libre circulation des produits. En particulier, tout comme les DTU, l'Avis Technique devient "eurocompatible". La Commission générale de normalisation et la Commission chargée de formuler les Avis Techniques ont validé l'opportunité d'établir et de proposer un document technique d'Application pour les produits dont l'utilisation relève d'une technique non traditionnelle. Instruit et publié dans le cadre de la procédure des Avis Techniques, le Document d'application est un avis sollicité à titre facultatif pour donner, avec le marquage CE, l'ensemble des informations requises pour apprécier la durabilité et les exigences de conception et de réalisation des ouvrages réalisés au moyen de produits et de techniques non traditionnels.

Le Document d'Application pourra ainsi être associé à des produits marqués CE, conformes à une norme harmonisée ou à un Agrément Technique Européen.

Depuis mars 2003, une nouvelle étiquette informe le consommateur. Conformément aux dispositions de la DPC, le fabricant y indique, outre le nom ou la marque commerciale, le code de désignation et le nom du produit, ainsi que l'organisme notifié (habilité par un État Membre, c'est-à-dire le CSTB, le LNE et l'ACERMI dans le domaine des isolants thermiques en France) qui est intervenu dans la procédure d'attestation des performances.

Cette étiquette porte deux types de mentions :

  • les mentions obligatoires pour le marquage CE (résistance thermique R et lambda déclarés, les dimensions, la classe de réaction au feu euro-classe obligatoire pour les emplois réglementés en matière de sécurité incendie),
  • Les mentions complémentaires selon les applications (stabilité dimensionnelle, compression, résistance à la traction, résistance au passage de l'air, absorption d'eau, etc.).

Elle pourra également porter la marque de certification européenne Key Mark, s'il y a lieu.

Vers un marché sain ?

Des efforts et des investissements considérables, tant au plan financier que celui de temps passé par les experts, ont été consentis par l'ensemble des industriels. Pour un industriel, le coût du marquage CE est en effet de 50 000 à 100 000 €, soit environ 1/3 du coût total de la certification. Les industriels souhaitent donc que des règles effectives de surveillance soient mises en place dans le secteur de la construction et que des niveaux d'exigences dans les futures réglementations thermiques permettent réellement de différencier les isolants aux performances garanties par un tiers indépendant des isolants dont les performances sont simplement déclarées.

Les industriels du FILMM pensent pour leur part qu'en refusant un niveau d'attestation de conformité des performances thermiques exigeant un contrôle des produits par un organisme notifié (alors même que de nombreux pays exigeaient la certification des performances thermiques), la Commission Européenne a remis en cause l'équilibre du marché. La surveillance du marché des produits de construction par les États membres de l'Union Européenne n'étant pas encore pleinement effective, il y a donc un risque réel de voir se multiplier des performances déclarées sans correspondance avec celles du produit vendu. Or, un écart de 10 % sur la conductivité thermique d'un isolant peut se traduire par une dégradation des consommations du même ordre de grandeur au niveau d'un bâtiment : seule une certification conduite sous l'égide d'organismes de contrôle compétents permet de surveiller un marché.