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"Respiration" sur le campus de Jussieu

Jussieu après rénovation : les poteaux de façade se transforment en pilotis et les poutres renflées assurent les grandes portées.

Parfois décriée et souvent mal vécue, l’architecture d’origine du campus parisien reste toutefois celle de l’un des plus éminents représentants du rationalisme constructif, l’architecte Edouard Albert. Derrière la monotonie, l'atelier d'architecture Reichen & Robert a tenté d’identifier les qualités intrinsèques de l’architecture du campus : la structure constructive des ouvrages avec leurs grandes portées et celle répétitive du "gril", autrement dit, la capacité évolutive des bâtiments et des espaces.

Plutôt que de faire table rase du passé, les architectes se sont employés à exploiter le potentiel spatial du réseau composé par l’alignement et l’intersection de bâtiments identiques. Une nouvelle structure fédératrice, constituée de deux axes de liaison, devrait bientôt traverser le campus. Elle se superposera au "gril", tout en hiérarchisant les espaces. Les rapports à la ville seront repensés. Certains patios seront couverts. Et c’est avec une véritable déférence pour les solutions imaginées dans les années 60 que la rénovation des façades est en train d’être conduite. Leur expression formelle d’origine, qui repose sur une lisibilité constructive, y est parfaitement respectée.

 



Plan du campus de Jussieu

Rénovation respectueuse de l’œuvre de l'architecte

Edouard Albert reprochait à l’architecture en murs rideaux de masquer la structure en libérant les façades de leur fonction porteuse. Pour la faculté des sciences de Jussieu, il en avait pris l’exact contre-pied en utilisant une petite trame structurelle de poteaux tubulaires (trame de 1,50m) et des nez de plancher apparents. Il s’inscrivait à l’époque dans une culture rationnelle et constructive qui s’opposait aux façades conçues comme de simples enveloppes. Un peu à l’image du "gril", il s’agissait en somme de tisser une enveloppe qui soit aussi un "revêtement structurel" de façade parfaitement continu.

Jean-Pierre Nauleau, responsable de la rénovation des façades, explique que la mise aux normes de confort et de sécurité s’est accompagnée d’une mise en œuvre de panneaux en CCV (panneaux composites en ciment-verre) et de châssis ouvrants à la française comportant des vitrages respirants. Le CSTB a réalisé les essais utiles à la vérification des prototypes. Les techniques de fabrication des vitrages respirants sont en effet délicates et demandent une excellente qualité de contrôle et de suivi. Dans ce banc d’essai du CSTB spécialement dédié aux problèmes d’embuage, il s’agissait de contrôler la bonne "respiration" et l’absence de condensation dans la lame d’air dans des conditions réelles ou même défavorables de fonctionnement.

Encore réservés à certaines entreprises, les vitrages respirants offrent d’excellentes performances thermiques et acoustiques. Les techniques sont évidemment amenées à se diffuser plus largement dans un contexte de développement durable. Les vitrages mis en œuvre à Jussieu ont par exemple "un coefficient de transmission surfacique Uw de 1,7 et un indice d’affaiblissement acoustique de 35 à 38 dB selon les zone", détaille Jean-Pierre Nauleau. Ils ont également permis d’intégrer à l’intérieur de la lame d’air un store vénitien en aluminium commandé par un dispositif de commande manuel. De quoi permettre aux étudiants et aux usagers du campus de retrouver la sérénité dans une architecture de nature fonctionnaliste, dont on commençait à douter des vertus spatiales et des qualités de confort.

 

 

Projet de rénovation

Fiche technique

  • Maîtrise d’Ouvrage : Etablissement Public du Campus de Jussieu EPA Jussieu
  • Maîtrise d’Œuvre : REICHEN et ROBERT & ASSOCIES
  • Bureau de contrôle : VERITAS
  • Livraison menuiseries extérieures : septembre 2008
  • Surface de façade : 36 100 m², y compris tranches conditionnelles