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Pour une pédagogie de l'espoir

A la tribune, cinq personnes entourent la psychosociologue. Magistrat, formateur et coordonnateur de ZEP, organisateur social, responsable d'une compagnie de théâtre et l'éditeur de l'ouvrage étaient venus expliquer les raisons qui les avaient poussées à aider et soutenir Joëlle Bordet dans la réalisation de son ouvrage. Un ouvrage qui, déjà par son titre, bouscule et interroge. « Le titre répond à une question que l'on ne devrait même pas avoir à se poser ? », estime Alain Maugard, Président du CSTB dans son mot d'introduction, tout en saluant le travail de Joëlle Bordet qui propose de porter un regard positif sur les jeunes des cités.

Fruit d'une riche expérience

Mais avant de proposer, Joëlle Bordet dresse un constat. Confrontés à l'exclusion sociale et aux discriminations de toutes sortes, exposés à la délinquance, les jeunes des cités font peur. « Cette peur engendre la mise en place de logiques sécuritaires, qui loin d'apporter des solutions, enferment les jeunes, les stigmatisent et nient totalement leurs capacités à devenir des adultes et des citoyens à part entière,» estime la psychosociologue. C'est contre cette "spirale sécuritaire" que Joëlle Bordet souhaite s'élever. Sa vision de la problématique s'appuie sur une expérience de terrain. Car loin de concevoir son approche de la dynamique sociale dans le confort de son bureau, Joëlle Bordet puise sa réflexion en se frottant à la réalité de la vie dans les cités. Depuis plus de vingt ans, elle sillonne la France et le monde, s'enrichissant sans cesse de l'expérience de la vie communautaire au Brésil, en Russie, en Israël, en Afrique. En arpentant  les quartiers populaires, elle a « mesuré l'énergie positive, le potentiel incroyable qui existait, la maturité de tous ces jeunes souvent bien conscients de la complexité des difficultés auxquels ils sont confrontés et que la plupart d'entre nous ignore ». Ce constat l'a amenée à proposer une forme de pédagogie de l'espoir dans les cités.

Humaniser la vie des quartiers

Son combat ? Inviter les acteurs de la société à faire grandir les jeunes des cités en construisant des solidarités entre les adultes et les institutions, en retissant du lien pour donner aux jeunes le désir et les moyens de devenir citoyen. « Le risque majeur, c'est la rupture entre la société, ses institutions et les familles en grande précarité sociale », martèle Joëlle Bordet qui affirme que des coopérations nouvelles peuvent s'instaurer entre les habitants, les élus et les professionnels à l'échelle des quartiers et des villes. Autour de la table, chacun peut témoigner de la pertinence de cette démarche par des expériences très concrètes, mises en place ici ou là. « Il faudrait valoriser davantage toutes ces actions. Vous êtes des gens trop modestes », intervient quelqu'un dans la salle. « L'évaluation et la valorisation passent par une réelle volonté politique », répond Joëlle Bordet.

Elle transite aussi par l'édition d'ouvrages comme celui que vient de publier la psychosociologue du CSTB, disponible en librairie aux éditions de l'Atelier.

Autres collaborations

Joëlle Bordet collabore également à d'autres supports. Elle vient notamment de diriger, dans la collection des Cahiers de l'action, de l'Institut national de la jeunesse et de l'éduction populaire, un ouvrage intitulé "Prévenir les ruptures adolescents-institutions". Une présentation de trois recherches-actions mises en ?uvre, de 2002 à 2005, en Ile-de-France à la demande des institutions. Sur chaque territoire, un thème a mobilisé les acteurs (élus, institutionnels, professionnels et jeunes) : les identités sociales et politiques à Saint-Denis ; les rapports entre légalité et illégalité à Gennevilliers ; l'absentéisme scolaire à Garges-Lès-Gonesse. Joëlle Bordet est également l'auteur d'un film de 52 minutes, "Vivre en banlieue, un éducateur dans la rue", conçu avec Marie Mitterrand, chez Casedei Production pour Public Senat. La psychosociologue y a apporté sa caution sociologique et la trame de l'histoire. Notons enfin sa collaboration à la revue "adolescence". Le numéro de mars a été entièrement coordonné par ses soins.