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TRIBU : Vers une exigence environnementale

Immeuble de bureaux Green Office, Meudon (92)

Alain Bornarel cible très clairement les enjeux fondamentaux et la responsabilité des acteurs de la construction et de l'aménagement du territoire dans la maîtrise des ressources épuisables (énergie, eau, matières premières, sol...), dans la réduction des gaz à effets de serre, et dans la préservation de la biodiversité et des milieux naturels (écosystèmes vivants, nappes, qualité de l'air...). Dans un contexte de crise, les économies d'énergie ne sont évidemment pas les seules préoccupations d'une démarche de développement durable, même si la raréfaction et le prix de celles-ci, associées au dérèglement climatique, en font des objectifs de première importance.

Le développement durable, mais à quel niveau?

A l'échelle du bâtiment, il ne s'agit pas de faire de simples "boîtes à faible consommation explique-t-il : "Nous avons le souci de soigner la qualité de l'éclairage, de la ventilation naturelle et d'être attentifs aux risques pour la santé ou à l'énergie grise des matériaux, c'est-à-dire celle nécessaire pour leur fabrication. On y pense peu, mais l'énergie pour produire des menuiseries aluminium est par exemple 36 fois supérieure à celle utile pour leurs équivalents bois". A l'échelle urbaine ou territoriale, la stratégie environnementale n'en est pas moins déterminante. Pour l'ancien Centralien, gérant de la société TRIBU, la question de la part de territoire à prendre en compte pour une meilleure performance énergétique reste posée: "Ne devrait-on pas considérer l'îlot tout entier plutôt que les bâtiments isolément?", interroge-t-il. La bioclimatique doit se conjuguer avec l'urbanité. Et la qualité des milieux ainsi que la gestion des modes de déplacement restent des thèmes d'investigation insuffisamment développés. Face à des Plans Locaux d'Urbanisme toujours gourmands en nombre de places de stationnement, Alain Bornarel semble par exemple vouloir répondre qu'"avec la moitié du prix d'une place de parking par logement, on peut payer le surcoût d'un immeuble BBC."

Des contributions techniques d'avant-garde

Dans un domaine en plein essor, TRIBU explore des dispositifs originaux au-delà de l'approche normative. Comme pour le lycée Jean Jaurès de Saint-Clément-de-Rivière, dans la région de Montpellier, où des réflecteurs sur les façades sud concilient le confort d'été et un éclairage intérieur uniforme avec un FJ de 2% (facteur lumière du jour) sur l'ensemble du bâtiment. La ventilation naturelle de la plupart des locaux de l'externat y est assistée par des tourelles à vent australiennes (la France n'ayant pas de fabricants) et contrôlée par registre asservi à la vitesse de l'air.

Pour le projet d'immeuble de bureau "Green Office" de Meudon comme pour celui du siège de l'IGN de Saint-Mandé, Edith Akiki et Alain Bornarel expliquent avec une exigence sans concession que les objectifs de consommation énergétique doivent prendre en compte l'ensemble des usages, informatique et bureautique comprises: "les 50kwh/m²/an ne concernent qu’une partie des usages et les factures globales sont bien supérieures à l'arrivée." En cours de conception dans le cadre d'une étroite collaboration avec les architectes de l'Atelier 2M, le projet "Green Office" vise directement le bilan énergétique nul. A dessein, la moitié des plateaux ne dépasseront pas une profondeur de 13,50m afin que la lumière pénètre efficacement dans le bâtiment, alors que ceux de plus de 18m auront un noyau central entièrement dédié à des locaux annexes ou techniques. La ventilation naturelle d'été, remplaçant le double-flux hivernal, sera assurée par des ouvrants motorisés en façades. L'originalité architecturale de l'espace intérieur des bureaux tiendra pour sa part à l'absence de faux-plafonds techniques absorbants. Non pas pour des raisons esthétiques, mais pour profiter de l'inertie naturelle des matériaux. Les études ont en effet montré que le recouvrement de seulement 30% de la surface des dalles béton était nécessaire pour une acoustique de qualité, permettant ainsi d'en utiliser 70% pour le stockage du chaud et du froid.

Mais les projets vraiment performants sont encore trop rares. TRIBU ne cache pas qu'un immense travail de formation des concepteurs et des entreprises reste à faire, même si les techniques de conception d'un bâtiment consommant 50kwh/m²/an sont aujourd'hui parfaitement maîtrisées. "L'isolation par l'extérieur est toujours difficile à faire mettre en œuvre selon les règles de l'art", souligne Edith Akiki. Si le monde de la construction neuve en est aux prémices d’une véritable révolution, la transformation de l'immobilier existant se heurte encore à des problèmes d'investissement. Sa mutation vers le durable représente pourtant un enjeu fondamental pour des économies d'énergie à une échelle significative. Pour Alain Bornarel, l'existant finira par suivre; la construction neuve doit pour cela continuer d'ouvrir la voie technique et montrer l'exemple: "Un projet qui sera livré dans 2 ou 3 ans, voire plus en urbanisme, ne devrait pas être moins performant que le niveau BBC, qui selon toute vraisemblance, deviendra la norme en 2012."

 

  • THPE: Bâtiment Très Haute Performance Energétique, correspond à la RT2005 -20%.
  • BBC: Bâtiment Basse Consommation, correspond à 50kwh/m²/an. A titre de comparaison, la RT2005 correspond à une consommation de 100kwh/m²/an.
  • BEPAS: Bâtiment Passif dont les besoins sont inférieurs à 15kwh/m²/an.

 

 

 

Immeuble de bureau Green Office à Meudon
Siège social de l’IGN et de Météo France
Lycée Jean Jaurès de Saint-Clément-de-Rivière, dans la région de Montpellier