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L'air des espaces clos à l'épreuve des bancs d'essais

Légionelle : de l'eau à l'air

Au départ, un réservoir hydrique. Elles aiment l'eau tiède entre 25 et 45°C.et se développent dans les canalisations. Elles se dispersent facilement dans les aérosols, notamment dans les panaches des tours aéroréfrigérantes. Elles ? Les légionelles, et particulièrement Legionella pneumophila, bactérie pathogène opportuniste pour l'homme lorsqu'elle est inhalée.

Afin de mieux comprendre le développement et la propagation des légionelles, les biologistes du CSTB ont élaboré plusieurs programmes de recherche. Car si le comportement de ces bactéries est assez bien connu dans l'eau, qu'en est-il en dehors de leur milieu de survie habituel ? Quelle est l'efficacité des biocollecteurs et autres appareils chargés de mesurer leur diffusion dans l'air et l'exposition des populations ?

Pour répondre à ces questions, le CSTB a mis au point un plan d'actions qui comporte trois volets. Le premier concerne l'analyse de la survie de la bactérie dans des aérosols et des environnements parfaitement contrôlés. Action des ultraviolets, de la température, de l'humidité sur différents types de légionelles ? : cette étude réalisée en laboratoire a mis en évidence la capacité des bactéries à survivre dans l'air durant plusieurs jours, même si deux facteurs particuliers ? l'humidité du milieu ambiant et la souche utilisée de microorganismes ? possèdent un fort impact sur leur durée de vie.

Aérobiotest et camion laboratoire

Deuxième volet de l'étude du CSTB : la mise au point de l'aérobiotest. Ce banc d'essai en atmosphère confinée permet de caractériser l'efficacité des biocollecteurs commercialisés. Pour cela, la méthode employée consiste à générer un aérosol dont la concentration en micro-organismes est maîtrisée. Après une phase d'homogénéisation, le bioaérosol transite au travers du dispositif d'échantillonnage à évaluer. Les performances de ce dernier sont ensuite évaluées et  notamment sa capacité à préserver la viabilité des microorganismes collectés.

Un camion laboratoire, destiné à mesurer in situ la dispersion des légionelles, vient compléter les équipements conçus par le CSTB. Il dispose de tout le matériel adapté pour effectuer des campagnes de collectes à la moindre suspicion de légionellose. Un dispositif mobilisable sur "simple demande" par les DDASS, les DRIRE et, naturellement, par les entreprises potentiellement impliquées.

Maîtrise de la qualité microbiologique de l'air des espaces clos

Pour répondre à la demande des autorités sanitaires, le CSTB a développé des dispositifs expérimentaux pour étudier l'efficacité des équipements de décontamination microbiologique de l'air ambiant. Des outils uniques en leur genre.

Les industriels rivalisent d'imagination pour concevoir et commercialiser des systèmes de décontamination de l'air ambiant. Tous les appareils actuellement mis sur le marché reposent sur deux grands principes : le transfert de la pollution vers un média et/ou l'inactivation des bioaérosols. Des systèmes qui vont de la filtration couplée à l'ionisation jusqu'à l'installation dans les lieux de vie de plantes adsorbant les molécules chimiques, en passant par la photocatalyse, l'utilisation de plasma froid, d'ozone ou d'huiles essentielles.

Les essais menés sur ces dispositifs insérés directement au niveau des centrales de traitement d'air (CTA) sont effectués au travers d'une veine aéraulique (banc "one-pass") réalisée avec la coopération de la CIAT. Concernant les dispositifs autonomes, une étude est conduite à la demande des autorités sanitaires (Direction générale de la Santé). Les tests portent sur l'efficacité et l'innocuité des appareils du marché, tant à l'état neuf qu'après quelques centaines d'heures de fonctionnement. Pour cela, ces derniers sont placés dans une boucle d'essais au sein de laquelle l'atmosphère est parfaitement contrôlée. Des aérosols contenant des concentrations connues et homogènes de polluants de l'air intérieur (COV, particules...), de virus, bactéries, de moisissures, etc. circulent dans la veine aéraulique. A l'issue de tests, les teneurs de ces polluants sont mesurées avant et après le système à expertiser et un rendement de purification de l'air est ainsi défini.

Des tests "grandeur nature"

Après avoir satisfait à la première batterie d'essais, les équipements sont ensuite testés dans un environnement "grandeur réelle". Nom de code du dispositif expérimental construit par le CSTB et l'industriel partenaire : Asteria. Celui-ci est constitué de deux bureaux contigus reliés par un couloir, le tout représentant un volume de 200 m³. Dans cet espace clos, toutes les configurations de ventilation sont réalisables. Là encore, des aérosols de compositions connues sont injectés dans un bureau "source" et la diffusion de la contamination est tracée jusque dans le bureau "récepteur". Des mannequins équipés de capteurs permettent de simuler l'exposition des individus aux particules et aux agents pathogènes contenus dans les aérosols diffusés depuis le bureau "source". L'action des épurateurs est alors évaluée selon les différents endroits où ils sont placés dans Asteria : plus ou moins proches du sol, plus ou moins près des individus, dans des zones neutres, etc.

L'étude de la propagation des virus dans les bâtiments est, quant à elle, prise en charge au sein de l'Unité de virologie appliquée (UVA). L'équipement du CSTB offre la possibilité de manipuler ? en toute sécurité (isolateur P3) ? des virus respiratoires pathogènes présents dans des aérosols et d'observer leur persistance dans l'air en faisant varier différents facteurs environnementaux (température, humidité, rayonnements ?). Quantité de virus émis, survie dans le milieu ambiant, exposition des individus, caractérisation de l'efficacité des épurateurs, et intégration de ces éléments dans des systèmes globaux (bâtiments) constituent la prochaine étape de ces travaux ?

Banc d'essai Asteria, des tests qui simulent la réalité pour l'étude et la validation des systèmes de traitement d'air
Banc d'essai UVA pour étudier des moyens de lutte contre la contamination virale de l'air des bâtiments
Le banc "one-pass" permet de mesurer le rendement des dispositifs épurateurs en condition dynamique