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A l'épreuve du temps...

Dans le monument ou sous le monument ; à l'extérieur comme au plus profond de ses structures ; sur les façades comme sur les peintures, les marbres ou les bronzes ; in situ ou en soufflerie, le CSTB propose aujourd'hui une palette très complète d'études, d'analyses et de recommandations.

Ennemis extérieurs

Prenons l'exemple des études menées sur les effets de la pollution atmosphérique (voir aussi encadré). Christian Sacré, responsable scientifique du pôle Climatologie et Pollution, raconte : « Tout a commencé il y a vingt ans. Au départ, les premières mesures que l'on nous demandait étaient des mesures de pluies battantes amenées par le vent sur les façades, avec des analyses des eaux de pluie et des études sur l'humidité et la vitesse du vent. On a travaillé ainsi pour la cathédrale de Tours. Des études sur la capacité des façades à absorber l'eau, comme c'est le cas pour les pierres de Loire, qui sont très poreuses, ont suivi. Aujourd'hui, la demande concerne souvent le rôle des poussières et des dépositions de particules polluantes… » Dans le cadre actuel du programme national de recherche contre la pollution, le programme Primequal, le CSTB étudie ainsi la vitesse de déposition des particules sur certains revêtements, tels ceux placés sur les murs de l'hôpital de Nantes, "idéalement" situé en plein centre-ville.

Autre exemple d'intervention, en soufflerie climatique, cette fois : « Les gens de l'Université de Prague nous ont carrément amené un des clochetons de leur cathédrale ! Ils voulaient étudier les conditions d'absorption et d'évaporation des eaux de pluie ! »

Ennemis intérieurs

La recherche du CSTB concerne aussi désormais la pérennité des œuvres d'art, présentes à l'intérieur même des monuments. L'idée ? Identifier les composés organiques volatils d'origine microbienne - ceux émis par les moisissures développées sur les peintures, les colles, les vernis, les cuirs etc. mais ? avant que les premiers dégâts ne se voient ! Stéphane Moularat, de la division Santé du CSTB, explique : « Cette technique pourrait être utilisée pour détecter une contamination potentielle, non encore déclarée, ce qui permettrait dès lors de prendre les mesures préventives nécessaires. » Exemple prestigieux : l'étude engagée pour les grottes de Lascaux par le Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques - ce, en partenariat avec le CSTB. En septembre 2001, en effet, les parois de la célèbre grotte ont été victimes d'une contamination biologique par des moisissures : un duvet blanc, le "fusarium", a recouvert, en quelques jours, certains sols, voûtes et parois latérales. Pas question que cela recommence ! Stéphane Moularat continue : « Notre objectif est d'élaborer et de valider des capteurs qui pourraient empêcher, à Lascaux comme ailleurs, ces contaminations fongiques. Les conservateurs de musée ou de monuments ne manqueraient sans doute pas d'être intéressés. »

Collaborations et partenariats

Rappelons-le, ces recherches ne sont pas les seules œuvres du CSTB. Entre les partenariats avec les laboratoires du CNRS, les travaux menés avec l'INSR (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire), ceux menés de concert avec les laboratoires du ministère de la Culture ou de différentes universités, les exemples de collaboration ne manquent pas. Preuve que posséder une expertise pointue nécessite humilité et esprit large !

Penser aux fondamentaux

Interview de Charles Baloche, du Département Sécurité, Structure, Feu

Quels sont les bons réflexes à avoir lorsqu'on s'interroge sur la conservation d'un monument historique ?

Commencer par le commencement ! Avant de s'attaquer, par exemple, aux méfaits de la pollution atmosphérique, ne pas oublier de passer en revue quelques fondamentaux… Je pense, notamment, à la capacité de résistance de l'ouvrage à l'action du vent - ce, d'autant que les cartes de sollicitation au vent ont été changées et affinées depuis la tempête de 1999. Je pense aussi aux vérifications qui doivent être faites en ce qui concerne les résistances à d'éventuels incendies. Les décennies, les siècles qui passent, altèrent inéluctablement les structures ; dans certains cas, on se retrouve en présence de situations inacceptables !

Et les risques de séisme ?

On a tendance à les occulter et pourtant… Ils sont bel et bien réels dans certaines régions de France. De plus, il faut savoir que les constructions anciennes, souvent plus lourdes que les réalisations modernes, sont beaucoup plus dangereuses sur le plan sismique. En résumé, je crois que quand on parle de "pérennité" et de "durabilité", il faut déjà penser globalement avant de s'interroger sur le particulier.

Monuments et pollution atmosphérique

La pollution atmosphérique ? Sans doute l'une des menaces les plus agressives pour notre patrimoine historique. Grands responsables : le dioxyde de soufre et l'azote. Passage en revue sous forme de diagnostic.

Le monument présente en façade des "croûtes", des traces de calcaire dissous, des alvéoles…

Le chauffage au charbon et le chauffage individuel ont joué le jeu de certaines substances chimiques. Heureusement, ces "symptômes" devraient se raréfier dans les années à venir grâce aux récents dispositifs écologiques et mesures légales.

Le monument se couvre de mousses vertes…

Les nitrates présents dans les épandages mais aussi la combustion des moteurs à essence en sont en grande partie responsables. A noter que le développement, bien réel, des pots catalytiques sur les véhicules à essence ne peut cependant compenser l'augmentation constante du nombre de voitures…

Le monument, couvert de suie, présente un aspect grisâtre / noirâtre…

C'est dû aux agglomérats microscopiques, carbones non brûlés ou métaux lourds, qui se sont déposés sur les façades. Gaz oil et fioul en sont les principaux vecteurs. Là encore, les filtres à particules sur les moteurs diesel ne peuvent qu'en partie prévenir ces dommages…

Capteurs de pluie battante et de pollution installés sur la cathédrale de Tours
Grotte de Lascaux, nef, aspect du développement de Fusarium, mycélium blanc sous la frise des cerfs
Meuble présentant une contamination par des moisissures.