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Climatisation solaire : pour (après- ?) demain

Contre toute attente, la climatisation solaire ne flirte pas avec la science fiction : des installations existent en Europe depuis déjà une dizaine d'années (sans compter les premières expérimentations conduites à Paris lors de l'exposition Universelle de 1878) et quelques projets ont vu le jour en France dans les cinq dernières années.

A tel point qu'a été lancé un projet européen, "Climasol", dont l'objectif est de promouvoir la climatisation solaire via la diffusion du savoir-faire sur ces techniques. Ce programme, qui regroupe neuf partenaires dans sept pays et financé pour partie par la Commission Européenne, est coordonné par Rhônalpenergie-Environnement (agence régionale de l'énergie et de l'environnement de la région Rhône-Alpes). Il a été initié il y a deux ans, avec une concrétisation sur des bâtiments "réels".

67 installations en Europe

Le principe d'un appareil de climatisation solaire consiste, à partir d'un panneau solaire, à produire de l'eau froide ou de l'air froid. Les systèmes les plus répandus pour produire du froid en refroidissement, ainsi qu'en déshumidification, sont de deux types :

  • Les systèmes fermés : un groupe de production de froid produit de l'eau glacée ; elle est utilisable dans une centrale de traitement d'air et dans un réseau d'eau glacée qui alimente des diffuseurs tels que des ventilo-convecteurs ou du plancher chauffant - rafraîchissant.
  • Les systèmes ouverts : l'air est directement traité en fonction des conditions de confort souhaitées. L'eau sert de réfrigérant, elle est en contact direct avec l'air à refroidir.

Actuellement, 67 installations fonctionnent en Europe ; leur capacité de production de froid de 6 000 KW pour une surface de capteurs solaires de 16 000 m². Pour l'heure, seules quatre machines sont installées en France : dans la cave viticole de Banyuls (capacité de production de froid de 52 KW, 215 m² de capteurs solaires sous vide installés), dans les bureaux de la Diren en Guadeloupe (capacité de 35 KW, 100 m² de capteurs sous vide installés), à Chambéry pour une salle de conférences de l'Asder (puissance installée de 7 KW, 16 m2 de capteurs plan installés), et , charité bien ordonnée…, dans les locaux du pôle "Énergies Renouvelables" du CSTB à Sophia-Antipolis (voir schéma) : capacité de production de 35 KW, 60 m² de capteurs sous vide installés.

« Cette installation vise à démontrer l'efficacité de la climatisation solaire dans des conditions techniques et économiques réelles », explique Dominique Caccavelli, en charge des énergies renouvelables au CSTB. C'est dans la halle d'essais solaires du CSTB à Sophia-Antipolis et ses 250 m² de bureaux qu'est installée la machine fournissant 35 KW de production de froid, pour une puissance nécessaire de 15 KW. Le froid est distribué par des conduits d'air avec le principe de ventilation sans reprise. L'installation comprend une machine de production de froid à absorption, deux champs de capteurs solaires sous vide de deux marques concurrentes, un stockage d'eau chaude tampon de 300 litres et un stockage d'eau froide de 500 litres. Enfin, une tour de refroidissement rejette l'excédent de chaleur. Coût total de l'installation ? 152 150 € (soit 600 € / m², contre 220 € pour une installation avec pompe à chaleur), dont 55 400 € pour la distribution et l'émission de froid, le reste étant dévolu à la production de froid. Le poste "capteurs solaires" compte à lui seul pour 40 % de ce dernier poste, la machine en elle même ne représentant que 15 % du coût global. « Nos bureaux sont rafraîchis de mai à octobre grâce à cette installation, explique Dominique Caccavelli. Ce qui prouve, si besoin était, que le rafraîchissement solaire fonctionne parfaitement bien. L'abaissement de la température va de 4 à 6°C par rapport à l'extérieur, même si le confort n'est pas assuré en permanence. En effet, tant que la température de sortie des capteurs solaires est supérieure à 75°, il est impossible d'assurer le rafraîchissement, ce qui peut faire monter la température à l'intérieur jusqu'à 28° et, donc, créer des périodes d'inconfort. »

Reste que ce procédé n'a aucun impact environnemental négatif, si ce n'est la consommation d'eau par la tour de refroidissement. Il s'inscrit ainsi parfaitement dans la philosophie des bâtiments à énergie positive. Cela ouvre des perspectives pour le développement du solaire, qui pourrait servir au fonctionnement des compresseurs de machines productrices de froid qui pour l'heure fonctionnent à l'énergie électrique.

Si la technologie semble éprouvée, reste à faire baisser les coûts, encore prohibitifs pour le développement de cette technologie à grande échelle. L'une des pistes serait celle des capteurs solaires, encore onéreux qui, au CSTB comme ailleurs, grèvent la facture. Il conviendra aussi d'aller voir du côté de nos voisins européens et notamment du côté de l'Allemagne (où existent des installations de 10 KW pour des particuliers) et de l'Espagne pour trouver matière à développer en France d'autres projets financièrement plus viables.