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Un ministère qui résiste aux vents

Architecte : Pierre Fakhoury Crédit photos PFO

"L'auvent qui doit coiffer le ministère des Finances ressemble à un oiseau qui prend son envol. Il ne faut pas que cette similitude devienne réalité ! " C’est ainsi que Patrick Philippon, ingénieur d’études chez Eiffel Construction métallique, évoque le projet du nouveau ministère de Libreville. En effet, l’Etat gabonais a confié à Pierre Fakhoury - architecte qui a signé la basilique de Yamoussoukro et achève actuellement la réhabilitation du célèbre Hôtel Ivoire d’Abidjan, en Côte d’Ivoire – le soin de concevoir un ensemble moderne et fonctionnel pour abriter les équipes du ministère des Finances et le ministre lui-même. L’artiste a donné libre cours à son imagination et a conçu un ensemble aéré, aux lignes épurées. "Il s’agit de trois bâtiments surmontés par un immense auvent, de 100 m sur 100 et perché à 45 m d’altitude", détaille Isabelle Metais, ingénieur d’affaire chez Eiffel Construction métallique. Magnifique, certes, à condition de résister. Et si les vents ne semblent pas virulents sur la côté gabonaise, pas question de prendre le moindre risque. Situé non loin de la mer, dans un environnement dégagé, la couverture peut subir d’importantes forces de soulèvement et d’entraînement, difficiles à appréhender sur le papier. Les effets dynamiques et vibrations des poteaux de soutien, très élancés, doivent aussi être mesurés. Eiffel Construction métallique, qui accompagne l’architecte dans le pré-dimensionnement de la charpente métallique, a chargé le CSTB de mener une expertise aux vents.

Les essais en soufflerie

Essai sur maquette au CSTB

Jérôme Vinet, ingénieur climatologie et aérodynamique au CSTB, explique : "Nous avons créé une maquette en plexiglas à l’échelle du 1/150e sur un plateau tournant. L’environnement a été reconstitué sur environ 270 m alentour. Il prend en compte, sous forme de rugosités en polystyrène, les constructions existantes et la végétation." Pour déterminer les charges locales, 730 points de mesures ont ensuite été répartis au niveau de la toiture et des trois bâtiments qui la supportent, ainsi que sur les passerelles, certains murs de verre et sur l’Auditorium. Les charges globales ou semi-globales, elles, sont obtenues par intégration des pressions synchrones. Enfin, le comportement dynamique est étudié grâce à des mesures de vitesse de vent au niveau des poteaux.

La maquette a été mise à l’épreuve. Durant deux semaines, dans la soufflerie Jules Verne du CSTB à Nantes, le vent a soufflé fort sur le ministère des Finances en réduction. Et les experts ont évalué avec soin ses effets sur la construction. "Pour simuler la vitesse et la direction du vent, nous n’avions pas beaucoup de données climatologiques sur cette zone, précise Jérôme Vinet. Nous avons donc appliqué les normes Eurocode qui demeurent très sécuritaires."

Libreville : maquette dans son environnement
Mesure à mi hauteur des poteaux

Début avril, le CSTB a remis son rapport à Eiffel Construction métallique qui va l’étudier et sans doute demander d’affiner certains points. "C’est à la lecture des résultats des tests que nous nous apercevons qu’il est bon de préciser tel ou tel aspect, explique Patrick Philippon. Le CSTB est toujours très à l’écoute de nos besoins pour poursuivre les études jusqu’au bout, afin de nous fournir des éléments de dimensionnement aux vents fiables et complets, et nous permettre ainsi de concevoir la couverture."

S’il est trop tôt pour livrer un avis final, on peut déjà dire que le projet architectural du ministère de Libreville résiste aux vents. Aucune modification majeure n’est à envisager sur le bâtiment. Les Finances seront solidement amarrées au sol.