Quand la météo se mêle du bruit
La protection de l'environnement sonore est traitée de manière prioritaire dans les projets d'aménagement du territoire. Il est devenu impératif de connaître de manière toujours plus pointue les processus de propagation du bruit issu des infrastructures de transport ou d'origine industrielle. L'urbanisation rapproche les riverains des sources de bruit ; parallèlement, les niveaux sonores maximum admissibles ont tendance à diminuer. Conséquence : l'impact sonore environnemental doit être étudié à des distances de plus en plus grandes des sources, et la prise en compte des effets météorologiques devient alors indispensable.
Connaître l'incidence d'une nouvelle infrastructure routière ou ferroviaire à plusieurs centaines de mètres en zone habitée, étudier des moyens de protection antibruit de forme complexe et leur interaction avec les effets météorologiques locaux ou savoir si l'implantation d'une bande de forêt atténuera sensiblement le bruit ? C'est possible, depuis que le CSTB a développé le logiciel ATMOS (Advanced Theoretical Model for Outdoor Sound propagation).
Des effets combinés du vent et de la température
L'équation parabolique pour calculer la propagation des ondes sonores
Initialement utilisée en optique, électromagnétisme et acoustique sous-marine, la méthode de l'équation parabolique a récemment été appliquée aux problèmes d'acoustique extérieure. Cette approche est très utilisée pour résoudre un grand nombre de problèmes de propagation d'ondes en milieu complexe. ATMOS qui suit cette méthode, a connu des développements récents, améliorant ses capacités dans les domaines de la diffraction et de la réflexion sur des obstacles (application du principe de Kirchhoff), ainsi qu'un couplage avec d'autres codes acoustiques, comme MICADO (Eléments de Frontière) ou ICARE (Faisceaux) ou encore le couplage avec d'autres codes d'aérodynamique (comme FLUENT) pour la prise en compte de l'évolution des profils de vent autour des obstacles.
Bruit et pollution de l'air en vallée alpine
L'enjeu est de taille : contrôler et minimiser la pollution atmosphérique et les nuisances sonores engendrées par le trafic routier et ferroviaire le long des principaux axes de transport dans les Alpes. C'est le projet Alpnap qui a mobilisé de nombreux experts en météorologie, qualité de l'air, santé…, dont le CSTB. En ligne de mire pour l'ensemble de ces équipes : l'évaluation de l'impact environnemental à travers différents scénarios de transports (nouvelles infrastructures, ferroutage, limitations de vitesse…). A charge pour le CSTB de modéliser l'exposition au bruit de trafic sur le corridor Fréjus (vallée de la Maurienne et vallée de Susa).
Pour cela, il convient d'abord de passer par une description des processus déterminant le transport de la pollution atmosphérique et la propagation du bruit en vallées alpines incluant les effets météorologiques. Les outils ATMOS et MITHRA-SIG sont utilisés pour prévoir les niveaux de bruit, les concentrations de polluants atmosphériques et les effets sur la santé dans les couloirs de Fréjus et Brenner. De quoi apporter aux élus, consultants et experts en matière d'administrations de l'environnement et des transports comme aux riverains une meilleure connaissance des interactions entre les transports, leurs impacts et les populations, contribuant ainsi à .améliorer l'aménagement du territoire.
La forêt, écran antibruit
Plusieurs études in situ ont été menées sur l'incidence de la forêt sur la propagation des ondes sonores. Elles ont contribué à valider le modèle numérique utilisé dans ATMOS. La méthode développée permet de calculer les différents effets sur la propagation du bruit à la traversée de la forêt : celui des différents types de sol (bitume, humus, prairie), celui de la stabilisation des conditions météorologiques sous la canopée. Les arbres, s'ils sont suffisamment nombreux, agissent bien comme un écran antibruit climatique. Globalement, en moyennant sur l'ensemble des scénarios météorologiques annuels propres au site étudié, la présence d'une bande de forêt de 100 m de large permet de diminuer, au récepteur, le niveau sonore long terme d'une route de plusieurs décibels A. Cette méthode a déjà été appliquée avec succès sur le terrain, dans les Landes, pour connaître l'impact d'une étendue boisée le long d'une route nationale.
ATMOS, outil de référence
Dans le cadre de la normalisation française, l'usage du logiciel ATMOS présente l'avantage de fournir des calculs de référence pour remplacer les essais in situ et valider les méthodes utilisées dans les normes actuelles. Une collaboration entre le CEA et le CSTB a permis d'étendre le domaine d'application d'ATMOS à celui des explosions. Le projet a porté sur l'adaptation du code dans le but d'obtenir un outil de calcul numérique "de référence" de la propagation longue distance d'explosions de type nucléaire très basse fréquence (de l'ordre du Hertz) dans une atmosphère évolutive, ceci dans le cadre du traité de non-prolifération des armes nucléaires.
Une autre application portait sur le développement de la nouvelle méthode d'ingénierie unifiée européenne mise au point au sein des projets HARMONOISE et IMAGINE, dont le CSTB a été partenaire. ATMOS a servi de code de référence lors d'un important benchmark portant sur l'impact acoustique des autoroutes et voies ferrées avec prise en compte des effets météorologiques évolutifs.
Quelques références
- Impact météorologique sur l'évaluation du bruit des avions / AIRBUS-DASSAULT
- Effets couplés de la pollution de l'air et du bruit des transports terrestres dans les vallées alpines / Projet ALPNAP - Programme Européen Interreg IIIB
- Développement d'une méthode unifiée de prévision de bruit dans l'environnement / Projet HARMONOISE-IMAGINE / 6e PCRD
- Représentativité des mesures de bruit dû au trafic routier / ASFA
- Evolution de la méthode de prévision de bruit routier NMPB-96/ SETRA