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Toitures végétalisées : une contribution au développement durable

La toiture végétalisée extensive, une technique d'avenir

Groupement scolaire Billieu (source ADIVET)

Les bonnes raisons ne manquent pas pour se lancer dans la toiture végétalisée extensive (TVE). A ne pas confondre avec la terrasse jardin - toiture intensive - qui présente des contraintes. La technique de la toiture végétalisée devrait permettre, à grande échelle, de réduire les impacts négatifs liés aux évolutions urbanistiques et climatiques ; à l'échelle de la ville, d'améliorer la qualité de l'air et l'esthétique paysager, de réguler la température, d'optimiser la gestion des eaux pluviales ; au niveau du bâtiment, d'améliorer ses caractéristiques thermiques, acoustiques et la durabilité de l'étanchéité de sa toiture, de protéger le bâti…. On l'aura compris : il n'y a que des avantages à intégrer la végétalisation des toitures dans les pratiques, d'autant qu'elle s'applique aisément sur les principaux supports porteurs (béton, acier et bois) et que l'économie réalisée sur le coût de la structure est de 60€/m² comparativement à une terrasse jardin. En 2006, la France comptait 300 000m² de toitures végétalisées, soit 1 m² de toiture sur 75. Malgré tout, de nombreux efforts, notamment les incitations financières, sont encore à faire pour généraliser la démarche...

Une contribution au confort urbain

Etant donné que l'assèchement du climat urbain est une réalité (à Paris, par exemple, depuis plus de quinze ans, aucun brouillard urbain n'est relevé alors qu'il couvrait la ville de 15 à 25 jours par an), que les températures s'élèvent de 4 à 6° intra muros, que les eaux de pluie s'écoulent trop rapidement, la végétalisation des toitures est susceptible d'être l'une des solutions destinées à freiner l'augmentation de la pollution et à adoucir le climat urbain. Etant donné qu'une bonne proportion des eaux de pluie restent sur les toitures végétalisées extensives, elles participent activement à l'humidification de l'air.

La performance thermique des toits verts

Maison de retraite à Tours © Adivet

Les toitures végétalisées améliorent le confort thermique des villes, car elles récréent des zones d'évapotranspiration et d'humidification de l'air dans les villes qui sont devenues des îlots de chaleur, dont la température ne cesse d'augmenter. En moyenne, les toitures classiques représentent 30 % des déperditions de chaleur d'un bâtiment. La toiture végétalisée extensive permet de pallier le déficit. Elle constitue une stratégie bioclimatique idéale en associant sur le même toit protection solaire, inertie thermique et isolation acoustique. Par ailleurs, du fait de leur faible poids, les toitures végétalisées extensives sont particulièrement bien adaptées aux réhabilitations. Reste à déterminer la superficie nécessaire pour que cette technologie ait une action efficace et mesurable, la performance des toitures végétalisées extensives variant en fonction de la nature du substrat, de sa pose et des conditions climatiques. Une préconisation ? Etablir des protocoles communs entre les différents systèmes de toitures végétalisées extensives des différents pays afin de capitaliser les expériences dans un objectif d'optimisation de la performance thermique.

Côté gestion des eaux

La mise en place de schémas départementaux d'assainissement sera de toute évidence longue ; d'autres solutions peuvent être envisagées, telles que l'installation de toitures végétalisées. La TVE ralentit et limite le rejet des eaux d'orage dans les dispositifs d'évacuation, donc les risques d'inondation. La TVE peut absorber en effet des quantités d'eau très importantes. Certains systèmes de 6 à 10 cm peuvent retenir en moyenne jusqu'à 50 % des précipitations annuelles qui restent alors sur le toit, rafraichissant l'habitat. En outre, la TVE s'intègre parfaitement dans  la démarche HQE dont elle atteint les objectifs des cibles 1 (qualité des paysages) et 2 (utilisation de produits renouvelables nécessitant peu d'eau et d'entretien).

Rétention, effet retard et qualité des eaux de pluie

Bureaux Ministère des Finances, Noisy-le-Grand, architecte Paul Chemetov - © Ecovégétal

Entre 2002 et 2004, le CSTC (Centre Scientifique et Technique de la Construction, en Belgique) a mené une étude destinée à vérifier les performances de neuf "toitures vertes" disponibles sur le marché belge. Les conclusions portent sur leurs capacités de rétention hydraulique sur de longues périodes, leur effet retardateur lors d'averses intenses et la qualité des eaux rejetées. Les différences observées dans les toitures testées grandeur nature proviennent de la composition et de l'épaisseur des couches de drainage, de la densité des filtres, de la nature des substrats et des couches de végétation. Cette étude a permis de démontrer que les toitures vertes rejettent clairement moins d'eau que les toitures traditionnelles ; que dans la fraction d'eau rejetée, plus le substrat est épais, plus importante est la rétention. Cependant, la combinaison d'un substrat moins épais et d'une couche drainante adéquate permet également d'optimiser la rétention d'eau. Quant à l'effet retard, il a été observé notamment que les TVE à substrat inférieur ou égal à 100 mm réduisaient le débit de 30 à 50% et qu'elles décalaient de 5 à 10mn le point culminant des averses intenses. Cette étude a des répercussions intéressantes, tant en réhabilitation qu'en construction, car l'effet retard d'une toiture verte est fonction de ses dimensions, sa composition et de sa pente.

TVE et étanchéité, l'autre clé de la réussite

Le mot étanchéité peut être réducteur. Les ouvrages d'étanchéité concernent, sur un même élément porteur l'isolation thermique, l'étanchéité et sa protection. Ce sont des lots uniques qui doivent être confiés à une seule entreprise pour bénéficier de la garantie décennale. Dans le cas des TVE, la végétalisation est une protection particulière de l'étanchéité. Pour que l'entreprise d'étanchéité puisse mener à bien cet ouvrage si particulier, elle doit en connaître les clés de la réussite : choix de la végétalisation en amont déterminant sur les dimensions et la nature des éléments porteurs ainsi que sur la hauteur des reliefs ; taux de couverture souhaité et périodes de mise en œuvre ; choix des constituants (isolants thermiques, revêtement anti-racines…) ; mise en œuvre d'un entretien planifié réparti entre l'entreprise d'étanchéité et le maître d'ouvrage.

La progression des TVE sur le marché français

La toiture végétalisée est rentrée dans les habitudes constructives de la plupart des pays du nord de l'Europe et du continent nord américain. La France tend à rattraper son retard dans ce domaine grâce aux actions menées par la filière, d'une part, et la prise de conscience environnementale au plus haut niveau de l'état, d'autre part. Ce qui se traduit, côté chiffres, par un bond spectaculaire du nombre de TVE réalisées, qui est passé de 65 000 à 300 000m², entre 2002 et 2006, soit une progression de 50 % chaque année. A l'horizon 2010, on prévoit qu'elles dépasseront 1 000 000 de m². Un chiffre qui n'est pas utopique, la superficie moyenne étant de 75 m². 90 % des toitures vertes sont réalisées dans le neuf, 10 % en rénovation. Les donneurs d'ordre sont en majorité les marchés publics. Les principaux fournisseurs et concepteurs de systèmes de végétalisation des toitures appartiennent soit au monde de l'étanchéité, soit au monde horticole ou paysager.

Evaluation technique des toitures vertes, l'offre du CSTB

Le CSTB se mobilise pour que cette technique de végétalisation des toitures fasse l'objet d'évaluations techniques formulées par les experts de la Commission chargée des avis techniques (CCFAT). Un premier Avis technique instruit en novembre 2006 par le CSTB a ouvert la voie. Pour répondre à l'attente des professionnels soucieux de crédibiliser leurs procédés et leurs ouvrages, le CSTB ouvrira en 2009 le Grand Equipement Eau Aquasim sur le site nantais du CSTB. Un outil de recherche, de développement, de démonstration et de validation technologique dédié à la simulation réaliste et accélérée des évènements physiques et chimiques intervenant dans la chaîne de l'eau au sein du système bâtiment-parcelle-environnement.

30 000m² de toitures vertes en Ile-de-France

La région Ile-de-France subventionne une vingtaine de projets sur son territoire, soit 30 000m² de toitures végétalisées qui viendront couvrir des crèches comme des logements sociaux ou des copropriétés privées et même l'usine d'incinération d'Issy-les-Moulineaux. La région Ile-de-France soutient activement les TVE, qui participent à la réduction des gaz à effet de serre. Elles s'inscrivent donc logiquement dans la politique de développement durable de la région.

A Paris, les toitures végétalisées sont inscrites au PLU

En inscrivant les TVE dans son PLU pour essayer d'introduire ou d'augmenter la présence végétale dans la ville, Paris connaît une situation tout à fait nouvelle par rapport aux anciennes règles du POS qui végétalisaient au sol. Comme il n'est pas possible d'augmenter les espaces verts à terre, il suffit de les remplacer par des ouvrages en élévation, en toiture ou en façade. Les TVE pouvant être réalisées sur la plupart des équipements de la ville, ou des constructions privées, le projet a rencontré un vif succès.