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Six ATEx pour le nouveau satellite de Roissy-Charles-de-Gaulle

Surnommé "La Galerie Parisienne", le satellite 3 se distingue assez nettement des figures architecturales toutes en courbe du terminal 2 auquel il est relié par un métro automatique. Ici, pas d'héroïsme formel. L'organisation spatiale en trois bandes parallèles, communiquant entre elles par des passerelles, se présente, à l'instar des produits verriers omniprésents dans l'édifice parallélépipédique, comme un feuilletage de plans successifs, chaque couche affirmant sa logique fonctionnelle et constructive. Au cœur du "feuilletage", le bâtiment principal est constitué d'un corps central (véritable porte d'entrée du satellite avec ses comptoirs de correspondance, d'information, et son mail commercial) que prolongent les ailes nord et sud dédiées aux salles d'embarquement sur deux niveaux. A l'est du bâtiment principal, huit pré-passerelles revêtues de polycarbonate accueillent les multiples dispositifs d'accès aux moyens porteurs et aux très gros porteurs pour des vols exclusivement internationaux. A l'ouest enfin, face au terminal 2 dont elles closent la perspective, les coursives de débarquement s'organisent selon des schémas complexes de distribution en raison de la séparation des flux des passagers des vols moyens porteurs en régime Schengen et internationaux.

Lumière, temps et espace

Partout, le traitement de la lumière et les relations visuelles avec l'extérieur ont fait l'objet d'un soin particulier afin que les voyageurs en plein décalage horaire, dépaysés, arrivés à destination ou en correspondance, se réinsèrent immédiatement dans le temps et l'espace. A commencer par la mise en œuvre d'un Verre Extérieur Attaché (VEA) sur quelque 8 800 m² de façade des ailes du bâtiment principal. Thierry Meunier, responsable de la conception des façades pour Aéroports de Paris, explique que, pour contreventer le double vitrage sur une dizaine de mètres de hauteur, un système de raidisseurs à membrures elliptiques que relient par boulonnage des pièces moulées formant étrésillons, a été élaboré. "Les vitrages sont posés sur les extrémités des étrésillons en fonte à graphite sphéroïdal puis pincés par capots serreurs en alliage d'aluminium laqué."

"L'assemblage des vitres sur l'ossature secondaire est conçu comme une articulation, poursuit Jean-Louis Galéa, en charge de l'Appréciation Technique d'Expérimentation au CSTB. Des essais de comportement ont montré que les principes d'articulation et la conception innovante des raidisseurs métalliques suspendus à la structure principale du satellite, permettaient d'épouser sans difficulté la déformation des verres, confirmant à la fois la souplesse et la résistance de l'ouvrage.". Le résultat spatial, quant à lui, est saisissant. Les salles d'embarquement, sereines et lumineuses, offrent des perspectives sur les plaines de Roissy et le ballet des avions se préparant à l'arrimage.

A l'opposé, le long de la façade ouest des coursives de débarquement, les pare-soleil, élaborés pour se protéger des après-midi d'été, ne dérogent en rien à l'utilisation systématique du verre. Les 4 300 lames cintrées fabriquées en Chine sont en vitrage tri-feuilleté avec pour composant extérieur, un verre de 6 mm ondulé produisant des effets de texture. Les architectes d'Aéroports de Paris ont imaginé que ces pare-soleil, qui reposent sur des bras en aluminium moulé, admettraient par ailleurs une latitude d'inclinaison, variable d'une lame à l'autre, de 1°. Si bien que sur les 750 mètres de linéaire couverts par le dispositif, une immense onde de verre cintré, faisant écho aux propriétés du flutex, apparaît et disparaît sous les lumières changeantes d'Île de France.

Un "bâtiment école"

"Le satellite 3 d'Aéroports de Paris est un véritable bâtiment école", confie Jean-Louis Galéa qui s'est penché sur les quelques techniques non traditionnelles qui ont fait l'objet d'une ATEx. Au gré des orientations solaires, des contenus programmés, des impératifs constructifs et des ambiances recherchées, les solutions imaginées pour clore ou couvrir les 225 000 m² de plancher sont multiples et variées. Les façades hybrides, dites "Skywall", en double vitrage à bords décalés, comportent une ossature constituée de traverses et de montants repris par trois attaches sur la structure primaire. L'attache haute reprend le vent et le poids, l'attache intermédiaire étant est par un button bi-articulé et la fixation basse permet les mouvements différentiels. "Le projet est tout à fait exceptionnel par son ampleur et le nombre d'entreprises impliquées, renchérit Thierry Meunier. Pour amener la lumière au cœur des salons d'Air France, l'entreprise a réalisé des verrières à très faible pente. La société Eiffel s'est pliée à d'autres exigences avec la mise en œuvre de VEC intégrant plusieurs variantes et deux ATEx : afin de proposer une façade lisse à l'intérieur de la gare du métro automatique ou en salle de correspondance par exemple, l'ensemble des ossatures a été déporté sur l'extérieur du bâtiment."

Mais l'édification du satellite 3 ne représente qu'une étape dans la construction planifiée de l'aéroport. Les équipes d'Aéroports de Paris planchent déjà sur le satellite 4, a priori conçu suivant le même modèle. Enfin, certainement pas tout à fait...

Aéroports et développement durable

Lors d'une conférence en octobre 2007, les architectes d'Aéroports de Paris, Pierre-Michel Delpeuch, François Tamisier et Dominique Chavanne faisaient le point sur l'intégration de la démarche HQE sur les projets d'aérogare.

Pour Pierre-Michel Delpeuch, les aéroports tendent à devenir de plus en plus impersonnels à l'heure où ils deviennent beaucoup plus grands et bien plus complexes en raison de l'augmentation du nombre de voyageurs, du développement des zones commerciales, des plates-formes multimodales et des impératifs de sécurité. En dépit de contraintes toujours plus fortes, l'architecte en chef d'Aéroports de Paris donne certainement la clé de la qualité et de la diversité des projets du groupe en précisant que la gestion de l'espace reste au centre du travail de conception: "Le voyage est un moment singulier. Le voyageur attend d'être surpris. Et l'espace d'un aéroport doit être la vitrine d'un savoir-faire et d'une identité culturelle."

Vers une certification NF-Démarche HQE®


"Le projet de la nouvelle aérogare de Paris-Charles de Gaulle, reprenant la silhouette et les concepts généraux du tout récent satellite 3, est une opportunité pour explorer de nouveaux horizons, raconte François Tamisier. Loin d'être l'exacte réplique de son prédécesseur, le satellite 4 est à considérer, sous certains aspects, comme une authentique opération pilote. Sa parenté formelle et organisationnelle avec le satellite 3 (La Galerie Parisienne) est mise à profit pour se consacrer au développement de nouvelles ambiances lumineuses et pour contribuer au référentiel destiné au projet de certification NF-Démarche HQE® des aéroports, dans le cadre d'une collaboration avec CertiVéA, la filiale certification des acteurs et ouvrages du CSTB.

"Dès le début, nous nous sommes adjoint les compétences d'un bureau d'études pour qualifier techniquement les différentes cibles de la démarche HQE, précise François Tamisier, en charge des études. Objectif principal: 50 % d'économies d'énergie par rapport aux bâtiments déjà présents sur le site de Paris-Charles de Gaulle. Ce qui implique plus particulièrement une réflexion sur la lumière et le traitement de l'air. Ainsi, toutes les zones de vie et de transit des passagers sont en éclairage direct. Un maximum de 41 Watt/m² pour la puissance calorifique installée et 33 Watt/m² pour la puissance frigorifique installée a été dévolu à la climatisation. Et nous avons intégré un double système de réseau d'eau qui permettra de récupérer le ruissellement pluvial des toitures avant de le réinjecter dans le bâtiment après traitement."

En phase avec les cibles de maîtrise d'impact sur l'environnement extérieur et de création d'espaces confortables pour des coûts de construction prévisionnels réduits, l'architecture paraît pourtant pouvoir garder tous les effets de surprise chers à Pierre-Michel Delpeuch. Les filtres colorés de la façade Est, le puits de correspondance vantant la beauté de Paris ou encore l'association de tubes fluorescents à la lumière naturelle des salles d'embarquement, génèrent d'ores et déjà au stade de l'esquisse des "lieux à part", tels les espaces singuliers d'un voyage.

Fiche technique

  • Maître d'Ouvrage : Aéroports de Paris
  • Architectes (Aéroports de Paris) : Pierre-Michel Delpeuch, Jean-Michel Fourcade, Christine Frémont, Gilles Goix, Louis Fachin
  • Direction des travaux (Aéroports de Paris) : Philippe Pecquet, Pierre Aurières
  • Responsable conception des façades (Aéroports de Paris) : Thierry Meunier
  • Bureau d'études : INA (Aéroports de Paris), OTH, SETEC, GEMO-ODM (pilotage et coordination)
  • Bureau de contrôle : BUREAU VERITAS
  • ATEx : LAUBEUF, EIFFEL, PERMASTEELISA, VIRY, VMT.
  • S.H.O.N : 225 000 m²
  • Dimensions : construction mixte en béton (sous-sol et soubassement) et acier de 750 m de long, 80 m de large (hors tout) et 21 m de haut
  • Livraison : juin 2007